Avec celui-là elle hésite toujours.
Mépris ou pas.
Il prend ses filles pour des prostitués et il est de ce fait interdit d'en rencontrer une.
Interdit de fêtes. De quoi que ce soit qui lui permettrait de s'isoler avec une de ses protégées.
Désagréable et mégalo, mais intéressant pour les affaires.
Il est plus intéressant et sécurisant pour Keiko de vendre des renseignements que de faire chanter directement, et cet homme est un intermédiaire acceptable.

Pour peu qu'il garde ses pensées pour lui seul.

" Cher ami..."

Le mot ami semble écorcher les lèvres de la belle.

" Voilà longtemps que je n'ai eu le plaisir de votre visite. Et je vois que vous avez encore brouillé mon système de surveillance. C'est tout à fait inutile entre nous. "

Les écrans couverts de neige donne un reflet étrange au visage de J. Presque inquiétant. Keiko avale sa salive le plus discrètement possible, et pour une fois est heureuse de ne pas être un homme, l'absence de pomme d'Adam est un avantage pour ne pas trahir sa peur ou sa confusion.

Leur relation... N’a pas toujours été professionnelle. Elle a toujours mis un point d’honneur à lui faire croire qu’elle le méprisait. Le maintenir à distance.

Mais pour une femme comme KEIKO éprise de pouvoir, un homme tel que lui a quelque chose d’attirant. Cette manière de contourner la loi, la crainte et le respect qu’il inspire autour de lui. Et le pouvoir que lui confèrent ses petites affaires, ses arrangements avec le gouvernement. Son charisme…
Malgré tout elle lui fait sentir qu’ici ce n’est pas lui qui est le « personnage » dominant, et elle compose son masque avec soin.

D’un geste nonchalant elle lui indique le siège en face d’elle, et lui sers une tasse de thé. Comme si il s’agissait d’une rencontre mondaine. Tous deux savent que tout ceci n’est que préliminaire, un peu faux, un peu sur-joué, et que le plus intéressant ne viendra que dans un second temps.

« Quel est l’objet de votre visite ? Une personne que je dois espionner ? Pour ma part je n’ai rien à vendre aujourd’hui »

Elle repose la théière et se calle dans le fauteuil pourpre, ses mains gantés fermés sur la tasse. Elle lui sourit.
Une bête sauvage, même apprivoisée ne se soumet jamais.

Elle s'étrangle un instant avec son thé.
Un meurtre! Sous son toit!

" Inutile que je me demande si vous avez perdu la tête, de toute évidence c'est le cas !"

La tasse se pose avec violence sur le bureau.
Keiko se lève, elle est grande, un corps de liane perché sur des talons vertigineux.
Elle contourne le bureau et domine l'homme encore assit.

" Faire des affaires oui, utiliser des renseignements issu de petite séance de suggestion passe encore.
Mais le meurtre ! Jamais je ne me mêlerais à ça.
Trouvez-vous un Bouge ! Mais ma ruche? Comment avez-vous pu un seul instant croire que…Vous ne salirez pas ma ruche avec le sang de cet homme, vous ne détruirez pas ce que j’ai bâtit à cause de votre folie. Ce lieu est un temple ! Je sais bien que vous pensez que nous ne sommes là que pour assouvir des désirs physiques, vous ne voyez pas nos dons, notre art et je ne chercherais pas à vous convaincre. Quoi qu’il en soit c’est hors de question. "

Elle sert ses poings tellement fort que ses mains sont douloureuses. Le cuir de ses gants se tend, elle rêve de lui écraser le nez, de lui effacer ce sourire malsain.
C’est son sang à lui qu’elle voudrait voir s’étaler sur les murs à cet instant précis.
La proposition de tutoiement en est encore plus insupportable comme si il l’associait à ses idées de grand malade.
Elle ne connait pas personnellement l’homme qu’il souhaite abattre, et selon J, cette homme mérite la peine capitale, simplement parce qu’il le menace. Or J est un cyber criminel de haut niveau elle n’arrive pas à croire qu’il ne puisse contourner cette menace autrement.