- Je crois que l'heure est déjà bien avancée, j'avoue que je commence à avoir faim et j'aimerais être placée correctement... Je ne sais pas pour vous mesdames, monsieur... Mais le jeune homme et moi nous allons rejoindre le restaurant...
Elle me prit la main, et sans que je puisse réagir elle me traina Vers le Grand restaurant.

Ok, elle était effrayante. C'est tout ce à quoi j'ai droit comme description de la morte. Bien... je pourrais en chopper un et commencer à lui péter les doigts pour lui en faire dire d'avantage. Ça m'énerve ça, qu'on ne m'écoute pas quand je pose une question !
Enfin, ce n'est peut-être pas nécessaire. Ils ont tous vu un visage, il y a des chances pour que ce soit le même. Kaÿla l'a vu plusieurs fois, tout comme moi.
Qu'est-ce qui pourrait bien nous provoquer une hallucination collective ?

Peut-être qu'on en saura plus au cours du repas.
Souvent, les gens discutent à table. Je pourrais y entendre des choses intéressantes.
Ah mais, c'est soiré habillée... m'en fout, j'ai pas envie de me déguiser. Elle est très bien ma chemise, non ? Ils veulent quoi ? Que je mette une robe ?
Ça me fait déjà assez chier d'avoir à aller dans leur resto qui va être blindée de monde. J'aime pas qu'on me regarde manger. On regarde pas quand ça sort, je vois pas pourquoi on materait quand ça entre !

C'est quand la dernière fois que j'ai eu de la compagnie à table ? Je crois que ce n'est plus arrivé depuis la cantine du Centre et je n'en garde pas un bon souvenir.
Il fallait toujours que je me mette dans un coin, de préférence face à un mur, pour qu'on ne me voit pas, ou le moins possible. Des fois il y avait des collègues qui venaient me faire chier, des crétins qui n'avaient jamais vu un sourire de leur vie ailleurs que sur des images et qui voulaient voir celui de la bête curieuse, au seul moment ou j'étais obligée d'enlever mon masque. Parce que forcément, pour manger c'est pas pratique. C'était un challenge de garder le contrôle, éviter que ça me tire sur la gueule, avec leurs regards braqués dessus. Souvent ça finissait mal...

Merde ! Comment je vais faire ?!
J'en vois déjà qui s'en vont au restaurant. Si je les suis, il faudra que je m'installe avec eux, à une table, que je commande et après... c'est que j'ai faim aussi, mais à la limite, je pourrais bien sauter un repas, c'est pas la mer à boire... mais ça va sembler louche si je ne mange rien...

Et bah j'y vais pas ! Puis voilà. C'est dommage, parce que je risque de louper des choses, mais après tout, ils ne vont pas s'envoler. Je les retrouverais plus tard, dans un endroit peut-être un eu peu plus intime.
En attendant, je vais m'éclipser discrètement dans ma chambre et commander qu'on me monte quelque chose à becter.

Soudainement, coupant court à mes pensées intérieures une jeune personne, apparemment appartenant au personnel de l'hôtel, venait d'entrer à l'improviste dans la salle. Elle annonçait à la va vite que le repas était servit.
Certes ... mais cela ne m'intéressait pas particulièrement.

Il faut dire que je n'avais pas spécialement faim, ou si j'avais faim, sa sensation était étouffée par l'efflorescence de mes réflexions. En effet, entre la guerre de Chinatown et les flammes infernales qui ont suivit, la "téléportation" dans l'hôtel, l'offre de la chambre et les deux apparitions d'une abomination ressemblant approximativement à un visage il y avait de quoi faire.

En même temps toutes ces émotions étaient sublimées par le fait que j'avais refoulée tout cela pendant tout ce temps. Je ne m'était pas posée de question, il fallait que tout cela paraisse naturel, réellement naturel. Tout ces événements extraordinaires, cela relevait de l'insolite, hors de la coutume ... Et mon esprit droit à souhait avait repoussé tout cela dans un coin de mon inconscient.

Néanmoins, l'apparition nouvelle de ce visage, tout ces événements ... Cela avait dû faire tout revenir dans ma conscience, et mon esprit avait lâché. C'est un beau puzzle qui s'offre à moi ...

Sans même m'en rendre compte, j'avais allumé une cigarette. Ah, cette cigarette, il faudrait vraiment que j'arrête, c'est du plaisir, c'est mauvais, c'est ce qu'il faut combattre, et moi je m'y adonne comme si j'avais toujours était nécrosée par lui. Comment puis-je combattre ce que je suis moi même ?

Mais passons, nous verrons ça plus tard. Pour le moment nous avons un labyrinthe pour décors, et il faudrait éventuellement en trouver la sortie. Je me dois de garder mon calme, il ne faut plus craquer comme à Chinatown, cette grenade, mais qu'est ce qui m'a pris bon sang ! Oui, restons calme et analysons ...

Donc, un groupe de terroriste extrêmement puissant, un incendie ... Aurait-il été causé par eux même ? Si oui, pourquoi ? Une diversion ? Non, impossible, pourquoi s'être montré pour s'échapper ensuite ? Surtout qu'ils avaient l'avantage. À moins que ce soit leur apparition qui soit une diversion ! Pour préparer quelque choses sans que aucun des participants à ce mystère ne remarque rien. Où alors ce serait un test pour voir nos réaction, possible mais peu probable, nous ne sommes pas dans un simulateur à ce que je sache.

Tout cela me laisse sans voix. D'un autre côté, l'arrivée dans l'hôtel, lieu de débauche et de plaisir à grande échelle. Là où j'ai commencé à dériver du droit chemin. L'important c'est que j'y sois revenue, tout de même. Toute cette débauche, pour quelle raison ? J'ai l'impression que ma théorie du test s'alimente ...

Toutefois, coupant cours à ce grand moment d'utilisation cérébrale, une voix titanesque s'éleva et commença une magnifique leçon de morale sur le pêché, sur nos actes et autres, mais c'est pas ça qui allait m'aider pour le moment. Ce qui était plus dérangeant en tout cas, c'est l'énorme vacarme que tout cela causa dans l'hôtel, tout tremblait, sortait de ses gonds, s'envolait, un tremblement de terre, une punition divine, voilà ce que c'était. En deux temps trois mouvement, mon fauteuil tombait à la reverse, les billes de billards s'envolaient dans la pièces, les queues étaient éjectées avec violence, s'éclatant contre les murs, ou s'empalant dans les sièges, tout se brisait, les verres, les fenêtres, et le bruit ! Un vrombissement assourdissant ... En fait, le seul événement extraordinaire dans tout ce vacarmes, c'est que je sois encore en vie après ça ...

Si en vie je suis, entière je ne suis pas. J'ai mal au dos, j'ai des bouts de verres plantés dans quelques endroits de mon corps, ma main qui à été percutée par quelque chose ... Bref, c'est pas vraiment la panade.

Mais bordel, qu'est ce qui ce passe ?