En ce jour, je m'autorise une relâche. Je ne verrai pas de clients ce soir. Pendant quelques heures ne comptera que mon plaisir. Le mien, celui qui est enfoui au plus profond de moi et que je ne peux partager avec personne. Les clients ne sont pas réceptifs à ce genre de détail. Ils payent, prennent et repartent. Ils ne donnent rien. Je plains les Valkyries d'en bas, celles qui travaillent pour vivre, et ne profitent pas des plaisirs qu'elles distribuent. Mais je ne suis pas de celles là. Je suis de la haute. Je suis ce que les automates sont aux orthodoxes. J'ai les moyens, comme ils disent, et la situation pour m'octroyer mon propre plaisir.
Alors en cette soirée de relâche, je me rends à l'Opéra. Je n'entrerai pas dans la grand salle, il n'y a pas de représentation. Je passerai par la porte de service, comme d'habitude. Je saluerai Lent, qui somnolera appuyé sur son manche à balai. Et je rejoindrai la salle de répétition. Une heure, juste pour moi. Un tête à tête avec mon violoncelle. Je travaillerai mes gammes, profiterai de chaque croche et silence.
Mais ce jour n'est pas le bon.
D'où vient ce fracas qui me perce les oreilles? J'étais préparé à entre une douce mélodie, et c'est un bruit à la fois sourd et sifflant qui m'arrache un cri.
Combien de temps suis-je restée accroupie, les mains sur la tête? Le temps d'imaginer tous les scenarii possibles et imaginables. Quand je me rapproche de la vitre pour chercher du regard le lieu du drame, je me rend compte qu'il est bien loin. Et les dégâts extérieurs semblent minimes. Pourtant ai-je trembler comme si je m'y trouvais? Comment la détonation a t-elle pu me crever les tympans à ce point à cette distance?
ça devait arriver. Le Bagdad a sauté. Le lieu de rendez-vous le plus mal famé du coin, réunissant racaille de tout genre a sauté. Il doit y avoir de nombreuses victimes. L'endroit est fréquenté à cette heure.
Ce n'était qu'affaire de quelques jours... Je le savais...Et c'est arrivé. Je devrai faire demi tour, retourner dans ma suite et me reposer. Ou aller jouer du violoncelle à l'Opéra. Pourtant, je marche droit vers
les débris