Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert /

Ce matin je me suis réveillée avec une mélodie dans la tête. Ca parlait d’arc-en-ciel et d’oiseaux bleus. Je me souviens que de ces seules paroles mais je ne peux m’empêcher de la chantonner encore et encore, comme ça, ça me plait.

Je devais aller à l’usine ce matin il me semble. Mais, je pense que la pointeuse attend toujours que je vienne à elle pour qu’elle me bouffe ma carte perso avec son clic-clic mécanique et habituel. Elle pourra m’attendre encore longtemps.
Ilana est aux abonnés absents.

A peine levée, je me suis préparée à la va-vite. J’ai même pas attaché mes cheveux ! Vous y croyez vous ?
Ils volent au vent, au rythme de la brise taquine. Eux aussi profitent de la vague de liberté qui m’a bénie dès que j’ai ouvert les yeux.
A bat le chignon bien tiré !
A bat la tenue de la parfaite petite travailleuse !
J’ai pris ce qui m’est tombé sous la main dans mon placard et hop ! en route dehors !

Je devrai avoir honte. Je dis bien « devrai ». Parce que, finalement, je m’en moque. Nulle honte ce matin à courir dehors avec ma petite mélodie pour compagnie. Mon pas est léger et mes yeux sont émerveillés. J’ai pas envie de quitter cette béatitude qui me colle à la peau.
J’ai l’impression de voir. Voir ! Comme j’ai jamais vu.
C’est comme ci on m’avait enlevé un voile qui me masquait les yeux.
A bat la mantille que le Gouvernement avait posé sur mon regard !
Je voie les choses ! Et je les ressens !
Et puis tant pis si je fais une mauvaise rencontre.
Je m’en fous royalement !
On verra !
Et maintenant je voie ah ah !

Tiens encore cette chanson avec l’arc-en-ciel …
Sauf que j’y suis pas au-dessus comme chante le mec, moi j’y suis en dessous et je voie la vie de toutes les couleurs.

Éric pensait que tout allait s'arrêter... Pourtant le sursis semblait continuer.

Du coup il n'était jamais autant sorti de chez lui de son plein gré... De toute sa vie entière il est important de préciser !
Toutes ces rencontres qu'il avait fait en si peu de temps... En quelque sorte lui aussi avait perdu sa puce à cet instant précis. Vu que plus rien n'était sous contrôle, lui-même pouvait ôter son masque. Ou plutôt en essayer d'autres...
Quoiqu'il en soit, il devait continuer à vivre ce rythme effréné, se repaître de la moindre goutte de liberté qui s'échappait de la source défendue.

Éric enfilait prestement ses chaussures, flanqué contre la porte d'entrée.
Les bonnes habitudes...
Le plus important de tout c'est de revenir rapidement quand tout s'arrêterait. Il faudrait donc être à l'affût des nouvelles et courir vite... Non, pas courir vite, cela attirerait l'attention.

Il commençait à s'y faire, à ces rues un peu dingues... Croiser des tarés dans tous les coins, un peu stressant par moment, car ils pouvaient jaillir de n'importe où. Les éméchés arrivaient un peu plus difficilement, et bruyamment. Les tourtereaux sur trois pattes, ou à quatre pattes, aussi avaient plutôt du mal à surprendre... Enfin, d'une autre manière disons.
Mais il y avait aussi les illuminés plus calmes. Il pouvait lui-même se ranger dans cette catégorie... Mais depuis bien longtemps.

Il avançait d'un bon pas, droit devant lui. Jusqu'à qu'il soit obligé de tourner ou de se prendre un mur...
Il dépassait quelques personnes.

Il en dépassa une en particulier. Elle poussait la chansonnette. Enfin doucement...
Il avait déjà pris quelques pas d'avance quand il s'aperçut de la chose.

Son sourire malicieux réapparut sur son visage. Il allait finir par avoir des crampes à force...

Il s'arrêta net. Ne bougea plus.

Finalement je suis arrivée sur le port. Vous vous rendez compte ? Je ne savais même pas qu’il y avait un port par ici !
Incroyable !
Fallait vraiment que je sorte de mon train-train moi !

Les rues grouillaient de gens. Au début je me suis pas trop laissée frôler, de peur de … peur de quoi au fait ? De la proximité avec mes semblables. De la promiscuité également.
La puce me donnait des ordres. Maintenant je m’en rends compte.
Ne pas approcher. Éviter les contacts. Rester solitaire. Travailler. Travailler ! TRAVAILLER !!!

Tout ça c’est terminé.
Comme une petite barque ivre, j’ai décidé, oui oui, j’ai décidé ! , de me laisser porter par les gens. Sourire aux lèvres. Fleur aux dents.
Vogue vogue petite Ilana.
C’est moi qui les ai frôlés, touchés, palpés. Et finalement ça ne fait pas peur. Ca ne fait pas mal !
Au contraire, c’en est même agréable.

Et j’ai vogué. Enivrée par les gens.
Et puis, lui, je ne l’avais pas vu. Et je lui ai foncé dedans. PAF !
On n’a pas idée de faire la statue comme ça au milieu de la rue. Non mais ! C’est vrai quoi ?

Dans un rire que j’ai laissé s’échapper, j’envoie à cette personne un petit :

Désolée.

Tiens ... son parfum est très agréable. Chacun a le sien mais lui, ça me plaît.
Mais pourquoi je pense à ça moi ?

La petite chanson allait croissante à l'oreille de Éric. Une voix douce, claire. Une voix de femme...
Tant mieux. Il était plus aisé de lier une discussion ainsi, de partager quelque chose. Pas de compétition perpétuelle, nul besoin de bander de ses muscles à tout va jusqu'à la déchirure...
C'était comme cela, un point c'est tout. Qu'importe ce qu'on pouvait en penser. En bien ou en mal...

Crescendo...

Il n'avait pas prévu qu'il se heurteraient.

Il pensait tout simplement que la personne allait contourner l'obstacle, l'imbécile planter là, passer son chemin, tout au plus le regarder un instant, pour trouver une explication à ce double file en pleine rue...
Sans doute que la musique l'avait trop obnubilée. Le genre de ritournelle obsédante, qui vous rentre par une oreille sans jamais retrouver la sortie d'un quelconque côté. Elle était peut-être arrivée à un moment délicat des paroles où il ne fallait surtout pas se tromper... Ou à une octave traîtresse...

Un tout autre jour que celui-ci, y compris au siècle dernier, jamais la personne n'aurait réagi comme elle le fit... Elle aurait grogné, bousculé, hurlé, injurié, se serait excusée à la rigueur, voir aurait continué son chemin comme si de rien n'était.
Mais aujourd'hui c'était un petit rire étouffé, suivi d'un " bonjour " discret, qu'avait entraîné le heurt.

Une sensation bizarre s'immisça dans le temps de silence qui vint ensuite... Pas un bruit, pas un geste... Rien.
Pourtant il y avait quelque chose... Pour une fois cela ne venait pas de lui. L'inconnue - risque pleinement assumé d'en parler au féminin - faisait quelque chose mais il savait pas quoi. Situation un peu frustrante pour un curieux maladif tel que lui.

Alors il fallait briser cet atmosphère...
Éric ne savait pas vraiment à quelle hauteur se situait la tête de l'inconnue. Une légère rotation du cou envoya sa bouche presque sur son épaule. Ses yeux ne suivaient pas. Presque une scène de film d'espionnage... Le rendez-vous avec l'indic.
Pour parfaire le tout, il chuchota, en espérant malgré tout se faire entendre.

_ Vous chantez ?

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Jeu 2 Sep 2010 - 12:50

Il chuchote. Pourquoi donc ?
Il fait beau, il fait radieux, il fait envie de tout faire sauf de chuchoter.
J’ai l’impression qu’il se tourne au ralenti vers moi. Enfin quand je dis "se tourne" il ne se retourne pas entièrement. Juste la tête. Ça donne un effet comique sous mon arc-en-ciel.

Je pouffe de rire. Un tout petit rire. Pas moqueur non non ! Un rire joyeux.

J’avance à peine la tête, et le regarde intensément comme si j’allai partager un secret avec lui. Et je chuchote, toujours comme lui.

Oui, je chante.

Mes lèvres se sont vites refermées. Mais un sourire microscopique se dessine lentement tout en attendant de voir sa réaction. Et aussi vite je reprends beaucoup moins discrètement.

Pas vous ?

Mes yeux doivent pétiller je le sens. C’est pas grave car tout pétille autour de moi. C’est marrant l’effet que ça peut faire sans la puce qui vous dirige continuellement. J’adore cette sensation même. Je pense en être totalement accro.

Un cri strident déchire ce moment et me détourne l’attention trois secondes. Un goéland vient de passer au dessus de nous en nous gratifiant de son plus bel accord vocal. Son plumage était blanc et noir, strié par endroits de gris. J’ai même réussi à apercevoir son bec jaune orange dans un éclat de soleil.
Les yeux grands ouverts comme une petite fille je parle à ma statue vivante sans faire plus attention que ça.

Vous avez entendu ?
Ça fait bien longtemps que je n’avais plus entendu ça.
C’est rien mais c’est magnifique.

Je ne lâche pas le volatile du regard. Il plane sur une grande distance, là, juste au dessus du bassin. Machinalement je m’approche du quai pour mieux le voir partir vers l’océan, je m’arrête au dernier moment, pieds au bord du vide. Le vent fouette mes cheveux dans mon dos mais je ne fais pas attention. Je le regarde juste partir, là-bas, très loin, et aimerai bien l’accompagner.

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Jeu 2 Sep 2010 - 15:59

Un petit rire étouffé.

Alors Éric, toujours de son quasi-profil, esquissa un sourire sur sa joue découverte...
Il n'avait pas encore côtoyer ceux-ci... Les pleinement illuminés.

Elle assumait pleinement, enfin assumait non, mais en tout cas affichait sa joie sans aucune pudeur ni crainte de représailles.
L'arrêt brutale de la panne avait sans doute eu des conséquences sensiblement différemment selon les individus. Un retour plus ou moins rapide de la pleine interaction entre les toutes les zones de cerveau après tant d'années sans collaboration...

Oui, je chante.

Quasiment avalée. Sur un petit ton malicieux. Enfantin. Petite partie de " un, deux, trois, Soleil ! ". La petite fille attend patiemment, statufiée, que le chat détourne le regard.

Éric lèva les yeux.

Pas vous ?

Prononcée avec le même entrain juvénile... Éric s'attendait presque au petit rire ravageur d'une trois pommes.
Et elle avait gagné...
Elle avait atteint le mur sans se faire prendre. Elle prenait la place du chat. Parlait comme le chat... Ou questionnait.
Éric était bien embêté d'avoir si tôt perdu la main sans cartes à jouer au coup suivant.

Une indicible exclamation.

Joker du destin.

La petite fille avait trouvé une autre occupation... L'oiseau haut dans le ciel qui pouffait de voir toutes ces fourmis désordonnées sans leurs antennes...
Ses mots se détachent, sa parole est vaporeuse. Elle s'échappe !

Vous avez entendu ?
Ça fait bien longtemps que je n’avais plus entendu ça.
C’est rien mais c’est magnifique.

La dernière phrase résonnait dans la tête de Éric au rythme de la course de sa petite agitée qui voudrait attraper le papillon.

Il aimait cette phrase prononcée avec tant de vérité et de pertinence. Celles qu'on s'étonnent de voir sortir de la bouche d'un enfant.
Petit oxymore maladroit mais si doux à l'oreille.
Éric étala son sourire et soupira sans retenue.

Jusqu'au bain des gravillons.

Il se tourna rapidement en direction de ce bruit inquiétant.

Première fois qu'il l'apercevait. C'était bien une femme. Certainement pas une petite fille.
Les rôles étaient inversés à nouveau. Elle était de dos, cheveux au vent.
Elle n'allait pas tarder à s'envoler à ce train-là...

Éric sprinta avec toute la rapidité d'un jeune quinquagénaire branlant.

Enserra Rose d'un bras autour de la taille avant qu'elle ne risquât de passer par-dessus bord.

_ Attention à ne pas vous brûler les ailes... Vous pourriez boire la tasse.

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Ven 3 Sep 2010 - 15:22

L’un est parti.
L’oiseau.
L’autre a accouru.
L’homme-statue.

Tiens ! La statue s’est dégivrée et me tiens désormais par la taille.
J’esquisse à nouveau un sourire que seul l’océan peut voir. J’aurai pu me détacher de son étreinte, liberté étouffée, liberté qui s’envole, mais je n’en fais rien. Bien au contraire.
Son parfum que j’avais remarqué tout à l’heure revient à nouveau me titiller les narines en se mélangeant à l’air salin ambiant.
Pas déplaisant.
Mon regard se porte loin, jusqu’à l’horizon qui vient d’avaler le goéland tout entier.

Il est parti …

Mots étouffés, perdus dans le vent.
Toujours enserrée dans des bras inconnus, je lève le visage au ciel. J’inspire fortement pour m’imprégner de ce moment étrangement bon. La puce qui déconne, mes sens qui frétillent comme des milliers de petites bestioles excitées.
Les nuages filent à petite allure. Les vagues bercent les embarcations au loin, poussant légèrement les barques de pécheurs qui quittent le port vers la grande bleue. Les embruns viennent fouetter le parapet à quelques mètres de mes pieds, en contrebas.

Une envie folle me traverse l’esprit à cet instant.
La liberté me monte à la tête.
Et vole et vole petit oiseau …
Et vole et vole petite Ilana …

Machinalement je ferme les yeux et lève mes bras à l’horizontale.
J’expire longuement.

Prêt ?

Je viens de m’adresser à mon homme-statue qui me tient fermement. Il a peur. Je sens son cœur battre contre le bas de mon omoplate.

Si t’as peur … t’es mort !

Ça n’est pas une question. C’est une affirmation.
J’ai rigolé par pulsion. Juste un petit début de rire suite à ma phrase de gamine que je ne suis plus depuis bien longtemps. Et je me suis calmée aussitôt.
Moi j’ai pas peur ! J’ai juste envie.
A nouveau je ré-inspire fortement, gonflant mes poumons à bloc. Mes bras sont à l’horizontale parfaite et mes yeux se ferment. Mes talons quittent le sol et mon corps bascule vers l’avant.

Moi aussi je veux voler.
Trois quatre mètres nous séparent de la surface de l’eau.

Saut de l’Ange accompagnée, sans parachute, sans filet. Sauf que moi seule l’ai décidé et qu’il n’a pas eu le temps de nous retenir.
Merde ! Est-ce que je sais nager ?

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Sam 4 Sep 2010 - 12:39

Nouveau heurt. Décidément les situations s'enchaînaient et se ressemblaient...
Éric avait quand même du casser la routine. Fini donc le dialogue de dos...

C'était peut-être un peu précipité... Passer d'une vue écartée de dos, juste de long cheveux blonds, à un quasi-profil en gros plan... Ah ! Tenez, encore un quasi-profil !

Ils étaient vraiment très proches maintenant. Le coeur battant. Pas pour les mêmes raisons...

Il pouvait la regarder ainsi. Son cou et sa nuque, sa joue ronde... Il distinguait encore assez mal ses yeux.
Une chose qu'il avait bien l'occasion de voir, et même de sentir, c'était ses cheveux toujours ballottés au vent qui de temps à autre venaient fouetter son visage.
Ses yeux s'arrêtèrent sur son nez qui se trémoussait faiblement. Les odeurs apparemment prenaient le pas sur l'oiseau disparu. Son sourire, lui, ne quittait pas ses lèvres.

Il est parti …

Son inconnue s'était prise au jeu des chuchotements. Et il en fut bien content.
Peut-être cherchait-elle une autre paire d'ailes en levant les yeux au ciel... Ou tout simplement un peu de liberté, il sentit son ventre se gonfler, il la serrait sans doute un peu trop...
Éric relâcha un peu son emprise. Pas complètement, il ne voulait pas qu'elle agît de façon inconsidérée. La jeunesse d'esprit n'a pas conscience du danger.

Surtout qu'il la vit fermer ses yeux...

La tête de Éric paniqua, à droite, à gauche ; sa petite protégée avait ensuite levé les bras.
Les événements prenaient une tournure qu'il redoutait un peu... Une idée folle trottait dans la tête de celle qui désormais fixait les règles...

Prêt ?

Spoiler:

Si t’as peur … t’es mort !

Un nouveau petit rire.

Une profonde inspiration.

La sirène a parfaitement su ferrer sa proie et l'emporte à présent dans les profondeurs.

Pas sûr qu'il avait été utile d'apprendre aux moutons à nager s'était dit Éric...
Rose n'était pas sa doublure...

_ Ce n'est pas comme cela que cela se p... !

Bien sûr que les humains ne volent pas malgré leurs grandes ailes.

Stupide implant.

Plouf

Elle était fraîche.
S'insinuait partout... Les narines, la bouche, les yeux, qu'on avait pourtant pris la peine de fermer.
L'air se saturait rapidement en sel.

Il fallait libérer la sirène afin qu'elle puisse se mouvoir, regagner la surface, même si le premier réflexe était de se crisper à la prise.
Et puis pour que lui en fasse de même...

L'ennui c'était que la sirène nageait comme un petit chien mouillé... Un petit mouton mouillé...

Éric en était à sa j'en-sais-plu-combientième tasse... Le thé était mauvais...

Il en réchapperait, il était vieux. C'était comme le vélo comme on dit...
En revanche, sa camarade avait certes bien joué à " un, deux, trois, Soleil ! ", mais en aucun cas n'avait déjà pédaler dans l'eau.

Maillot rouge et bouée de sauvetage assortie.

Il la reprit à peu près de la même façon que sur le plancher des vaches. Au-dessus, lui en-dessous.
Il allait être forcé de se resservir du thé...

Parce que c'était beau de s'improviser sauveteur en mer, mais encore fallait-il trouver une plage...
Si l'on a pas institué la nage, pas besoin d'instituer les escaliers...

Éric perdait peu à peu espoir. Aucun moyen de remonter... Il n'avait jamais eu à faire cela. Et sauf son respect, mademoiselle pesait son poids de mouton mouillé...

Quand il aperçut enfin une pente douce sur le rivage, excité à l'idée qu'il allait vivre - un comble à Novlangue n'est-il pas ? -, il brûla d'une traite ses dernières forces.

Il tira son drôle d'oiseau sur le bord... Et s'affala comme... ce qu'on sait.

Pour le coup leur deux coeurs battaient pour la même raison.

Éric était incapable de reprendre son souffle comme il fallait. Son cerveau, ses poumons étaient complètement noyé d'eau et d'air... Situation plutôt douloureuse.
Et il devait encore s'assurer de la survie de son illuminée... On pouvait l'appeler comme cela à présent.

Il se redressa avec difficulté, se traîna jusqu'à elle.

Allait-il devoir pousser son rôle de sauveteur du dimanche plus loin ?

_ Ne vous... Fff... Fff... Ne vous avais-je pas... Ffff... Prévenu ?

Histoire de savoir si elle était consciente...

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Lun 6 Sep 2010 - 12:31

La chute avait été … tripante ! Cette sensation de ne plus avoir d’attaches, que son corps sombrait dans une chute incontrôlable. Sensationnel !
Adrénaline à bloc ! Excitée à mort !

Cela avait duré juste quelques secondes, secondes extraordinaires, magiques, folles. Juste le temps de crever la surface de l’eau et de changer illico de sensation.
Douloureuse celle-ci.
Inattendue surtout.
Le contact avec l’eau avait été très violent. Je n’étais pas préparée à cela. Mon homme-statue ne m’avait quasiment pas lâchée avant le choc fatidique. Après, son étreinte s’est perdue dans les remous de la masse aquatique qui nous pressait de plus en plus fortement.

Merde !
Comment qu’on fait ?

J’ai gigoté dans tous les sens lorsqu’il m’a lâchée. Pas moyen de me stabiliser ! Petite toupie folle, j’ai tout agité, bras, pieds, jambes et même la tête. J’ai ouvert les yeux pour essayer de le retrouver mais j’y voyais que dalle. A force de gigoter comme un petit cabri, j’avais la jupe qui me remontait dans le dos, libérant plus facilement mes jambes afin que je puisse faire de plus amples mouvements. J’ai bougé et bougé et avalé la flotte. Foutue flotte. Elle s’est insinuée au plus profond de ma gorge, me donnant l’envie de tousser et de cracher afin de pouvoir à nouveau respirer.
Alors que j’allai y rester, j’ai senti que quelqu’un me poussait vers le haut. J’ai accompagné ses mouvements pour tenter d’aller plus vite.
Plus vite.
Plus viiiite !!!
J’arrive au bout j'en peux plus j’vais crever …

Keuf keuf keuf.

La surface.
L’air !!!
Bordel c’que ça fait du bien. Je respire, à pleins poumons, à fond, les larmes aux yeux. Je voie des étoiles. Tout plein. C’est beau des étoiles sous un arc-en-ciel vous savez. Ca brille, ça pétille et ça illumine les yeux. Bon sang c’que c’est beau.
Et puis plus rien. Le noir complet alors que j’avais le son dans les oreilles.
Bruit de clapotis. Et puis aussi de quelqu’un qui peine à respirer. C’est moi ou c’est lui ?
Et est-ce que je respire au fait ?
Je ne sais pas.
Mais j’entends, donc c’est que je ne suis pas encore morte.
Encore des bruits.
Les mouettes, les goélands et un bruit de mouvement d’eau contre un sol. Comme un ressac. Tiens. On est au sec j’ai l’impression. Et sur le sol aussi. J’suis trempée et je sens mes cheveux me coller au visage. Idem pour les vêtements.

Nouveau bruit de quelqu’un qui se traîne. Et qui s’approche. Il me parle.
Je n’ai pas envie d’ouvrir les yeux. Je veux encore des étoiles. Et l’arc-en-ciel aussi.

Prévenue ?
Il m’avait prévenue ?
C’est bien ça qu’il me dit ?

Je n’ouvre pas encore les yeux. J’ai envie de profiter de l’après. L’après flip, l’après big sensation, malgré la peur que j’ai eue.
Quand il me dit ça je fronce les sourcils et le nez, yeux toujours clos.

Bien sûr qu’il m’avait prévenue mais je voulais y croire. Croire en la liberté, croire que tout était possible. Mais le choc m’a vite fait reprendre conscience.
Est-ce pareil pour tout ?
L’envie forte d’abord, puis la montée d’adrénaline suivie du pas que l’on franchit pour finalement finir … comme ça ?
Là pour le coup j’ai bien envie de pleurer …

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Dim 12 Sep 2010 - 23:58

Son visage répondait à ses phrases. C'était bon signe...
Et son cou palpitait, trahissant la vie qui s'acharnait dans ses veines...

Le fait d'avoir échappée de peu à la noyade n'avait pas l'air de la préoccuper outre mesure, elle semblait plus déçue qu'autre chose...
Interloqué un instant, Éric se pencha un peu sur son drôle d'oiseau, dégagea le plus délicatement qu'il put les mèches détrempées qui barraient son visage. Fit le chemin inverse, soupira bruyamment et s'allongea sur le dos, pour enfin souffler un peu.
Ses expériences prenaient une tournure assez inattendue... Jamais il n'aurait cru qu'elles puissent le mener droit dans l'Hofsá.

On ne peut pas tout prévoir.

Il tourna la tête vers sa collègue de bassin, les yeux toujours clos.
Elle non plus n'avait rien prévu. Et apparemment les résultats n'étaient pas à la hauteur de ses espérances...
Elle espérait vraiment voler ?!
Combien finirait à l'eau en ce cas... Ou aussi mal...

Satanés implants...

En attendant, ce visage attristé minait son moral.
Il fallait réagir. Rebondir. Tenter de nouvelles expériences. Au sec.

_ Dites... Maintenant que nous avons fait l'oiseau, sommes-nous obligés d'imiter le poisson jusqu'au bout... ? Parce j'ai pas spécialement envie de marcher comme un pingouin...

Il aimait se baigner tout habillé, mais pas être baigné tout habillé... C'est assez désagréable de porter des vêtements trempés sur soi toute la journée... Et ils n'avaient pas prévu les serviettes non pl... Ah, peut-être...

_ Ce n'est pas très... Propre, mais il y aurait un moyen de jouer carrément les poissons-volants... Et en plus de ne pas ressembler à des pingouins de surcroît...

Ils seraient toujours aussi poisseux... Sans doute encore plus sale même...
Restait à savoir si sa Sainte Candeur en avait eu assez pour aujourd'hui...

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Lun 20 Sep 2010 - 15:29

J’aime bien l’image qu’il me donne de l’oiseau et du poisson. Pendant deux secondes je l’imagine en train de m’imiter le poisson, bouche en cul de poule, faisant des O joues creusées. Et puis le pingouin me fait perdre toute intention de rester yeux clos et semblant-inconsciente.
De suite je me mets à rire en l’imaginant toujours en train de marcher comme un pingouin.

Rire allongé sur le dos au bout de quelques secondes ça fait mal aux côtes. Si si j’vous assure. Vous avez jamais essayé ??? Bon ok moi j’avais jamais autant rit de ma triste vie.
Je passe vite en position latérale et ouvre les yeux.
Lui aussi est allongé. Et accessoirement trempé. Comme moi finalement.
Je relève légèrement le buste et m’appuie sur mon coude alors qu’il me propose quelque chose qui m’intéresse vachement.

Jouer les poisson-volant ?

Un jeu encore mieux que celui qu’on vient de faire ?
On pourrait vraiment voler ?
Non.
Il me ment là. C’est pas possible.
Mais … ça donne envie. L’Envie. Envie de quelque chose. Ca me fait dire "banco allons y ! je veux tout essayer ! c’est que du bonus ce que je vie en ce moment".

Vous savez faire ça vous ?
Mais comment ?

Je le regarde intensément désormais. Et je bascule à plat ventre, menton dans les paumes de mes mains, coudes au sol et jambes qui se croisent dans mon dos. Bon ok j’ai un peu froid et j’avoue qu’en dessous le sol n’est pas spécialement confortable mais en fait on s’en moque. Parce que là ! Là … Il me propose un truc d’enfer. Enfin j’espère.
Il respire encore vachement vite quand même. Oh et puis je lui ai même pas demandé comment il allait !!!! Et il vient de me sauver aussi !!! Mais qu’est-ce que je suis bête quand je m’y met !!! Je pique un léger fard, je dois sûrement avoir les pommettes toutes roses en ce moment et je lui bredouille, d’une petite voix confuse, des excuses.

Ca va vous ?

Au fait …
Je …
Suis désolée de vous avoir …
Vous savez …

Geste machinal de l’index. Pointage du bord du quai à … la flotte à nos côtés. Le saut de l’Ange quoi ! J’pensais pas qu’il m’aurait suivie.

Et ... merci !
Parce que sans vous je …
Je sais pas en fait.
Ils devraient nous donner des cours de natation quand même quand ils nous mettent la puce, non ?

Ok ok ton humour laisse à désirer Ilana. Mais après tout ça peut détendre un peu l'atmosphère chargé ... d'humidité ah ah !

Mais au fait ! Lui sait nager lui !!!

Vous avez appris où vous ?

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Mar 28 Sep 2010 - 0:40

Spoiler:

Éric écarquillait un tout petit peu les yeux. C'était impressionnant ce manque de retenu, d'impulsivité de la part d'une Orthodoxe. Enfin pas en ce moment... Seulement cette réalité était vraiment difficile à concevoir. Tant de temps passé parmi les pantins qu'à force on peut être sceptique quand on les voit prendre vie ; on soupçonne quelqu'un de tirer les ficelles... Mais cette posture adoptée par ce pantin-là lui laissait à penser qu'il fallût un marionnettiste bien habile.
Alors il se contenta d'arborer celle qu'il savait le mieux faire : le sourire flanqué sur son visage. Il mima son interlocutrice. Jusqu'au détail des jambes croisées, se ballottant dans les airs. Ils avaient l'air de deux gamins... Manquait un peu d'herbe quand même.

Il n'avait pas pris en note toutes ses questions. Fallait-il vraiment y répondre... Il en doutait. Et puis après coup les réponses ont toujours moins d'impact. Elles sonnent creux ; laissons-les filer en ce cas...

En revanche ses yeux plissèrent lorsqu'elle lui fit part de sa réflexion sur les cours de natation.

_ Hin hin ! Figurez-vous que je me suis fait la même réflexion... Peu avant que nous ne plongions...
C'était évident qu'ils n'avaient pas pensé au plus important !

Quant à où j'ai appris à nager...

Éric sombra un instant dans ses pensées... Cela remontait à bien loin. Il n'était même pas sûr de pouvoir se remémorer cet événement. Seulement quelques éléments... Une couche-culotte mouillée, du sable blond - aussi blond que ses cheveux longs -, une bouée à la tête de gallinacé quelconque et aux couleurs criardes...
Il n'avait jamais aimé la plage. Pourtant ce jour-là, il avait du apprécier ce moment...

_ Cela remonte à bien avant vous...

Mais c'est plutôt au « quand » que je réponds...

Son sourire fuyait d'un côté, presque jusqu'à son oreille. Il contemplait le regard espiègle et brillant de son rayon de soleil du jour. Le spectacle en valait la chandelle.

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Ven 8 Oct 2010 - 15:16

Soudain il eu l’air mélancolique. Je ne sais pas pourquoi. J’ai l’impression qu’il a dû se remémorer des moments dus passé.
Et d’un coup je fais légèrement la moue, parce moi, mon passé, je m’en souviens pas le moins du monde. Juste mon boulot, toujours le même, ma routine, mon restaurant chinois habituel, là où je mange chaque soir seule, les transports en commun où, assise gentiment sur la banquette j’attends sagement chaque station jusqu’à ce qu’on arrive à celle où je dois descendre.
Une routine triste et sans saveur.

Mes jambes battent toujours la mesure silencieuse de la petite chanson qui me revient en tête.
Sous l’arc-En-ciel.
On y est bien là-dessous.
Surtout quand on est en si bonne compagnie.
J’ai l’impression qu’il pourrait m’apprendre des tas de trucs ! Me montrer des choses auxquelles je n’aurais jamais osé penser. Et les faire également !!!
Ce serait si chouette !

Mais hélas le temps nous rattrape bien trop vite.
Déjà là haut sur le quai, j’entends des claquements de pieds. Ca courre et ça crie. Bousculades et ruades.
Mon Arc-En-Ciel se fane.

Ils sont là !

Une voix sur-excitée. On est recherchés ?
Mais pourquoi donc ?
Qu’a-t-on fait de mal ?
Ma mélancolie m’inonde et m’envahie toute entière. Lui aussi, je le voie. Il vient de comprendre tout comme moi.
Mon rêve se casse la figure.
Et je commence à culpabiliser déjà. De ce que l’on vient de faire. Ce moment de folie pure. Ce saut de l’Ange angélique. Pourquoi je culpabilise ?
J’attrape mal à la tête.
Et j’ai envie de pleurer.
Ils viennent de reprendre ce qu'Ils venaient de nous offrir : un pur moment de liberté.

Je pleure en le regardant s’affoler mais surtout face à la réalité : les implants viennent de re-fonctionner …

Sujet: Re: Sous l'Arc-En-Ciel / Ouvert / Lun 25 Oct 2010 - 14:21

Il regardait toujours son amie aux mimiques enfantines.
Elle avait l'air heureuse... Il ne connaissair toujours pas son prénom d'ailleurs. Il faudrait peut-être songer à lui demander...

Elle brassait l'air avec ses jambes. Mais pourquoi aimait-il tant ce genre d'attitude...
En plus, sur un adulte c'était un peu étrange... Malsain ?! Ce n'était quand même pas de sa faute si Novlangue était à présent peuplée d'enfants.

Son coeur battait à la vue de ce petit moulin à vent. Fort. Très fort...

Trop fort ?!

Il avait l'impression de l'entendre... Qu'elle aussi pouvait l'entendre. Qu'elle cherchait même l'origine de ce bruit.
D'instinct, Éric leva la tête en direction d'où lui semblait provenir les battements de son coeur...

Une mer de bottes en uniforme...

Cette fois c'était bien son coeur qu'il avait senti, tombé dans le vide.

Elle aussi était dans le même état que lui...
Tout deux pétrifiés par le naturel chassé qui revenait au galop militaire...
Éric ne put que la contempler, la joie s'écoulant inexorablement de ses yeux.

Un coup de feu.

L'arc-en-ciel s'évanouit derrière un gris nuage de balles...

Éric a sursauté, s'est remis sur ses pattes. Il s'est emparé de la jeune femme, lui fait signe de ne pas faire de bruit, puis s'introduit silencieusement dans l'eau.
Il s'approche d'elle, lui prend son autre main, et les pose sur les reliefs du rebord.

_ N'ayez pas peur... Tant que vous vous tenez, vous ne risquez rien. Et puis, je ne vous lâche pas.

Ils se faufilèrent lentement le long du bord... À la recherche de leur salut.

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