Get it!

Assise sur un banc à la propreté douteuse, je laisse mes beignets de crevette me transmettre leur chaleur à travers le carton de leur emballage.

Je ne sais pas quoi dire.

Elle n’avait pas faim, c’est très bien comme ça, ça fait toujours moins de sous à dépenser. Mais on fait quoi maintenant ?

Je l’ai suivie par impulsion, trop heureuse de céder à l’imprévu et d’avoir trouver une occupation. Mais maintenant, je ne sais pas trop pourquoi on est là, toutes les deux…

Pourquoi tu m’as suivie ? Tu disais que tu voulais apprendre à me connaitre. Pourquoi ?

Des beignets?
Et le chinois alors?
Je m'attendais à ce qu'on attrape un de ces chinois au regard craintif pour l'apporter à un préparateur.
C'est pas ça "se faire un chinois"?
J'étais déçu.

L'odeur du gras de la pâte entourant les crevettes ne me rappelait rien de connu.
Une odeur étrange et forte.
J'arrivais à sentir le fumet rance du gras se déposer sur toute ma nouvelle garde-robe.

-Je t'ai suivi car tu m'intriguais. C'est tout.
Je veux apprendre à te connaitre pour mieux comprendre les motivations qui poussent les gens à agir de telle ou telle manière.
Tu brillais parmi cette masse de vêtements ternes.
Tu allais droit à travers ces gens grouillant dans tous les sens.
Tu portais ta tête haute au milieu de cette foule qui gardait tête baissée
C'est comme si tu avais une aura différente et que les choses de ce monde ne t'affectaient pas.

Je la regardais droit dans les yeux.
Je ressentais quelque chose, sans savoir quoi.
Sa peau, si lisse, si blanche, si pure était si belle.

-Qui es-tu Citronel?
Parle-moi de ton passé, de ta vie, de ton but.

Rictus. Je ne sais pas sourire.
Les mots coulent, se déversent, clairs et limpides, naturels et spontanés. C'est doux d'entendre quelqu'un parler aussi franchement, sans se cacher. Je l'admire. J'aimerais bien faire ça moi aussi.

- Mon passé? Si tu savais, Arthonis... Me croirais-tu si je te disais que mon passé n'existe pas encore?

Chut, les voyages dans le temps, c'est du secret-défense.

- Mais toi aussi, tu sembles différente des autres. Tu cherches à comprendre pourquoi les gens agissent comme ils le font? Je peux au moins te répondre pour moi. Tu as raison, je suis une Automate. Aussi je n'agis que quand cela me profite. Je n'ai pas d'idéal, pas de rêve. Comme tant d'autres, je fais ce pourquoi je suis née.

C'est la vérité. Même si elle me reste en travers de la gorge. Même si j'aimerais pouvoir allumer un feu sur un de ses pans, et la regarder s'embraser dans des couleurs chatoyantes. La détruire, et repartir. Sans identité, donc libre.

Mais je suis bien trop lâche.

- Je te déçois, peut être? Désolée. Je n'avais aucun intérêt à te laisser croire le contraire. Tu me détestes maintenant?

Ca serait bien. C'est ce qu'il faudrait. Ne pas oublier, tu es une distraction, je te jette quand je veux. Parce que je suis une pourrie. Une Automate.