K-Cendre. La garce aux yeux de biche, la prêtresse de tous ses tourments, la Valkyrie, amazone indomptable qui avait su le chevaucher... Il rêvait d'elle. Souvent.

Son regard mauve avait remplacé celui de toute autre en son esprit, et chaque nuit, il revenait, le laissant chaque matin très insatisfait. Et plus sa faim grandissait, plus les idées germaient dans son esprit. Il n'avait pas le temps de retourner la voir pour l'heure, et se satisfaisait assez de la laisser dans l'expectative. Mais les plus grandes frayeurs nécessitent une petite piqûre de rappel certaines fois.

Il allait la démolir. Mais en attendant...

Un soir, un homme en livrée verte débarqua à l'Opéra. Il se fraya sans difficulté un chemin jusqu'aux loges, parfaitement invisible aux regards de tous, et pénétra dans la loge de K-Cendre pendant qu'elle chantait sur scène.

Il déposa ce pour quoi il avait été mandaté, puis repartit comme si de rien n'était. Certains pouvoirs mentaux sont intéressants.

Sur la coiffeuse, devant le miroir, divers objets étaient désormais disposés. Un splendide bouquet de fleurs, denrée rare s'il en est dans une ville coupée du monde extérieur, où seules quelques serres s'adonnaient encore à cette activité, presque clandestinement. Leur parfum capiteux embaumait l'air, mettant en valeur le pourpre soyeux de leurs pétales veloutés. Des roses, aux longues épines pointues, dans un vase en cristal orné d'une Amazone terrassant un guerrier.

Au pied du vase, une boite ronde cachait son contenu par un fin papier translucide. Dessous, une lourde robe pourpre reposait, brodée de parures mauve du même ton que le regard de la Valkyrie. Un collier en or blanc se parait d'une lourde pierre violette.

Entre les deux, une enveloppe blanche portait une inscription d'une calligraphie fine.

A la plus piquante des Roses

L'intérieur contenait une invitation au cocktail organisé par le Père de Jaden pour sa nomination honorifique au rang d'Historien Mentaliste.

Elle ne viendrait pas. Il le savait. Elle n'oserait jamais venir. Tous ces cadeaux n'étaient qu'une ironie profonde. Il lui rappelait qu'il pensait à elle. Et qu'il était riche et plein de pouvoir. Il pourrait faire d'elle ce qu'il voulait... Mais elle ne viendrait pas.