... Ou encore là

Je peux faire ça, oui.

Je descends à son niveau, cote à cote, je prends sa main, tire et pousse sur les jambes. Vive le saut du siècle.

Plouf...

AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH

Ce qui vaut mieux que "oh puttttaaaaaaaaaaaaaaain", vous avouerez. Elle s'améliore, la petite rebelle.

PLOUF

Kim se noie. Peut-être...

Je ferme les yeux et j'appelle ma maman. Non, j'en n'ai pas. Tant pis.

Elle crie, mon oreille se bouche. Et puis l'eau. On s'enfonce. C'est profond. Tout corps plonge dans un liquide subit une poussée équivalente. On remonte.
La surface et le brouillard de l'eau qui chute sur nos têtes.

Je crois que j'ai oublié comment léviter

Le temps de prendre une grande inspiration pleine d'embruns, elle rit. Un vrai fou rire qui la fait couler, avaler de l'eau, hoqueter, rire encore.

Elle s'appuie sur l'épaule du grand lévitateur, parce que quand même, ce truc de flotter dans l'eau, là, elle maîtrise pas.

T'es beau avec les cheveux mouillés !

Vous êtes belle quand vous riez !

Dieu que sa vie devient précieuse. Plus que la liberté.

Hop, un baiser. Tout mouillé, mais ça, c'est la cascade. Pas la faute de Kim.

Heureusement qu'il sait flotter, lui. Il y a un truc à faire avec les jambes. Elle essaie : ça marche.

Tu m'emmènes au sec ?

Un baiser ? Touché au coeur. Je coule. Comme une masse.
Elle bat des pieds, elle flotte. Elle n'a plus besoin de moi, déjà. Trop tôt.

Je chute dans l'eau. Les yeux ouverts au milieu des bulles. Je la regarde en coulant, torse, ventre, jambes, pieds, rien.
Rien ?
Elle me manque déjà.

Gloup...

C'est compliqué de parler avec de l'eau plein la bouche.

Ah, non.

Ah, non !

Pas si tôt, pas possible, pas déjà, pas maintenant que.

Kim coule aussi, tant pis. La tête la première, c'est plus classe. Et plus pratique aussi pour attraper Jude.

Elle bat des jambes, super efficace ce truc, ils remontent.

Une grande inspiration plus tard :

Ah mais tu sais pas nager en fait ?

J'étais bien dans la version Jude chez les poissons.

Mais, elle c'est mieux. Je respire et bois son regard.

Je sais très bien nager vers le bas
Tout droit et à l'horizontal, on verra quand ce sera le moment.

Vous m'embrassez ?
J'ai soif.

Elle fronce un sourcil.

D'accord. Quand on sera au sec !

Parce que, tout droit et à l'horizontale... ça a l'air compliqué. Mieux vaut un petit chantage.

C'est un peu vexant.

je boude

Oui, en plein milieu de la flotte. Je croise les jambes.
je coule, encore.

Ah mais pfff mais non ! On le saura, que le chantage, c'est nul.

Bon, maintenant elle connaît le principe. Tout corps plongé dans un liquide, et caetera.

Une fois Jude re-re-re-sauvé des eaux, elle le laisse évacuer un trop-plein de noyade et reprend où elle en était un moment plus tôt. Mouillé, mais pas de sa faute, et caetera.

Alors... Tant pis. Je tombe raid en arrière. En planche, je flotte.
Et je me rattrape aux flots, pour la rejoindre et l'enlacer. Regarder son visage avant de lui prendre un baiser trempé.
Accroché à elle, je grandis pile et poil, d'un coup.
Un baiser de cinéma, voluptueux, généreux. Je veux. Encore. Elle. Couverte d'eau. Désirable. Libre.

Et tout de suite.

Ou je fais un caprice.

Un baiser sous la cascade, c'est l'union des contraires. Ardeur et fraîcheur. L'eau tiède et sucrée de sa langue, l'eau froide et toxique de Novlangue. Et eux ? Noire et blanc, l'enfant adulte avec l'adulte enfant. Beaucoup de contrastes encore ? Elle ne sait pas, elle s'en fout complètement, d'ailleurs. Elle est en train de se transformer en volcan sous-marin. Éruption imminente.

A un moment, il ne flottent plus. Elle ouvre les yeux : il est drôle, avec ses cheveux en couronne autour de sa tête. Leçon de vie : on ne rit pas dans l'eau, ça noie. C'est où le haut ? Ah, là-haut. De l'air, enfin. Une petite goulée vite fait, et de nouveau, l'apnée de ses lèvres.

A tâtons, elle dénoue l'écharpe qu'il lui a si soigneusement enroulée autour de la taille, tour après tour après tour. Son tee-shirt remonte tout seul, merci Archimède. Elle ouvre l'œil. Elle voit...

Une chemise blanche qui ondoie. Leçon de vie : le blanc mouillé, c'est transparent. Mais c'est que Monsieur est bien foutu, pour un intellectuel.
Elle voit sa main chocolat qui ne fond pas, tirer mine de rien sur un pan de la chemise vanille, s'insinuer dessous.

Six, on roule et bascule. Sept, elle boit la tasse, encore. Huit, chatouilleux ? on va voir.

Chatouilleux et pire, comme un enfant nouveau nez. Il se déhanche pour s’échapper, pas loin, il ne veut pas qu'elle se noie. Il la protège, elle l’emmène les bras tendus devant lui, la tire et l'attire vers lui, et la rive de l'autre coté. Là où les pieds touchent le fond, et l'eau cache les corps jusqu'au visage.

De la boue sous les rangers, elle manque s'étaler en retrouvant un appui. De la boue sur la rive, aux reflets suspects d'arc-en-ciel. Plus loin, du vert et de l'herbe. De la vraie, pas tondue au millimètre !
Elle s'empare de la main de Jude et tire. Elle se sent lourde, soudain, sans le support de l'eau, mais dérape vaillamment jusqu'à l'endroit où Novlangue n'agit plus.

C’est la que je veux toucher.
Là, son crane.

Je peux ?

Elle lui offre un sourire entendu et penche la tête, jusqu'à poser son front sur la chemise trempée.
Puis elle se débarrasse d'une veste gorgée d'eau, celle de Jude, qui atterrit dans l'herbe. Une deuxième veste à tordre, la sienne, qu'elle envoie faire "floc" un peu plus loin. Il ne reste plus qu'à passer ses bras autour de la taille de Jude.

Il pose ses mains sur la chevelure absente, ces cheveux si courts que ça l’intrigue et lui plait. Tant, qu’il ferme les yeux et pose sa joue contre.
Ses mains dérapent, oublient les cheveux absents et s’éparpillent sur les épaules de, elle.
Jude pas si grand, timide du bout des doigts, attire la chemise, le tee shirt ? Ses yeux sont fermés.
Et dénude les épaules.

Frisson. Elle ouvre les yeux sur les boutons blancs de la chemise blanche, sagement alignés, bons petits soldats. Elle a envie de les arracher avec les dents, mais ne le fait pas. Du bout des doigts, elle dégrafe, un, deux, trois, ceux du haut. Pose ses lèvres juste au-dessus du cœur qui bat.

Il lui parle avec son cœur. Un langage qu’il invente, du mot à mot rythmé pouls fort et doux à chaque pause, et puis un bémol dans la mélodie cardiaque.
Il pose son front sur son épaule, là où le tissu vient d’être emporté par sa main. Le long de biceps, libre la peau sur les épaules, le haut du torse, le devant d’elle qu’il n’ose voir. Jamais vu l’inconnue. Il remercie Elle, de cacher ce qui l’intimide en écoutant les mots du cœur.

D'une torsion des bras, elle s'échappe de ses manches ; le tee-shirt retombe autour de sa taille comme une ceinture. Elle récupère vite ses mains pour les reposer sur lui, l'une dans son dos, l'autre autour des derniers boutons de la chemise, quatre, cinq, six, sept, ouverte. Ses lèvres continuent leur exploration du côté de l'épaule. Elle pense un moment à contrôler sa respiration, mais pour quoi faire, contrôler, après tout ?

C’est un enfant ?, qui soulève le menton d’Elle posé sur le bout des doigts, qui relève le visage en même temps que ce geste, qui l’accompagne et vient frotter sa joue sur la sienne, qu’il oublie pour siroter sa peau plus bas que la joue, plus bas que le menton, plus bas que le cou ?, juste là, sur son cou, au dessus de là où il ne veut pas regarder.
Sa main laisse le visage d’Elle, laisse tout en chantier pour s’ouvrir enfant au monde des grands, celui qu’il fuit depuis enfant. Dans son dos d’abord, descendant doucement, découvrant les formes, les omoplates, creux, aspérités, jusqu’en bas du dos, les reins qu’il empoigne sans force. Les hanches, parce qu’il les contourne, et remonte le long d’elles. Haut plus haut sous les bras presque… ses mains s’ouvrent béates. Sans rien pouvoir faire, sans prononcer un mot du bout des doigts, figées, incapable de terminer leur course.
Jude échoue son front sur la clavicule d’Elle.

Son souffle s'arrête au milieu d'une inspiration. Elle ouvre les yeux : son épaule à lui, dénudée. Puis sa main à elle, posée léger sur l'omoplate. Puis l'horizon, loin comme jamais.
Elle fait un quart de pas en arrière pour dérober son appui à la tête qui se dérobe. Elle cherche son regard, pose les mains sur les siennes, et les aide à se refermer lentement. Entre les pouces et les index de Jude, il y a comme deux yeux bruns, deux de plus à le regarder.

Elle murmure : Je le savais.

C’est comme ça qu’on devient grand. Sauf que pas lui. Lui, qui a toujours une réplique cheveu sur la soupe, un air sourire et rien à cirer, un geste aussi déplacé que son imagination le pousse, lui, il reste figé les mains en trop, comme des artifices inutiles.
Les paroles de Elle, ne la rassure pas plus que ça. Il se demande pourquoi il n’y a pas de livre sur le sujet à la bibliothèque. Il aurait eu l’air moins stupide ? Non, l’air stupide, c’est son domaine de prédilection. C’est autre chose.
Un souvenir qui passe, le temps de chambouler sa cervelle et mettre le désordre. Un souvenir qu’on n’en parle pas.

Il dit : « Pouf » Le souvenir s'étiole.

Et merci.

J’aime, doux, tendre, je peux ?

Il pense : aimer, toucher, caresser, découvrir jusqu’à les user, mais il en prendra soin, c’est promis. Ça, il le dit « j’en prendrai soin »

Un coin de sa lèvre frémit, ses yeux pétillent.
C'est à toi.

Elle se rapproche un instant de son oreille, pour répondre à la question qu'il n'a pas posée. Du rire dans sa voix.

Je le savais que mes seins étaient faits pour tes mains.
Ou l'inverse.

Ça ne suffit pas. C’est ce qu’il se dit. Il veut... autre chose. Il veut… il est Jude, faut-il expliquer toutes ses envies, ses gestes, ses paroles ?
Il les aimera plus tard.
Il le dit « plus tard »
Et il la soulève dans ses bras, poids plume, il est grand, assez fort. Il ne le savait pas.
Il la soulève et la dépose sur l’herbe grasse. Et l’invite à s’allonger sur le ventre.
Lui, s’allonge, la tête posée sur son dos, perpendiculaire à Elle.

C’est beau là haut, là haut, là haut… plus haut !
Mais, le ciel attendra.

Il se retourne, appuyé sur les coudes, toujours perpendiculaire, le visage en face des hanches de Elle. Il embrasse son dos, ses hanches, ses reins, sa peau, ses grains, un à un, délicat comme une plume, comme des flocons de neige.

C'est encore plus beau quand c'est inattendu. Il est encore plus beau, lui, de n'être jamais prévisible. Elle n'a connu que l'ascension furieuse et préécrite des corps enfermés dans leur désir, tendus vers une acmé qui la laissait sonnée et vaguement déçue. C'est encore plus beau quand c'est lent.
Elle se laisse soulever, elle se laisse allonger, petite poupée Kim. Sur le brin d'herbe, juste devant son nez, il y a un insecte qu'elle n'a jamais vu, tout rond, rouge avec des points noirs. Elle pense aux pastèques. Elle souffle : la bête s'envole.
Elle ferme les yeux pour mieux écouter la caresse des papillons électriques sur sa peau.

Il découvre son dos, en un seul sens, celui du touché, de l’exploration de chaque détail qu’il embrasse, qu’il sourit d’y voir naitre les stigmates d’un plaisir ici, juste là, où naissent les frissons. Et tous s’échappent, courent sur la peau, et si ce n’était Jude, il pourrait les voir s’en aller au creux des reins, là où perle le désir. Lui, les voit s’envoler devant ses yeux d’aventurier, et former un feu d’artifice, non deux, trois, dix, partout, mille feux. Il a beaucoup d’imagination, Jude.

Quand les frissons deviennent presque douloureux, elle roule sur le dos. Offerte ? Non. Elle a croisé ses avant-bras sur sa poitrine. Pudique ? Non. Il a dit plus tard.
Le regard intense de ses trois yeux l'enveloppe comme un cocon. Il y a des mercis dans ces regards. Un sourire très doux flotte sur ses lèvres. Elle attend. Ou pas.

Elle attend. Mais pas Jude. Déjà, il blottit le troisième œil sous un baiser, comme ça, pour lui dire de ne pas regarder. Il doit l’assimiler à ce qui pousse dans le ventre des femmes après l’amour.
Et puis, il glisse sur le ventre, sous la poitrine, il vient chercher les mains d’Elle avec sa tête.
Il pourrait ajouter Ouaf, mais il n’est pas un chien.

Au tiers aveuglée, elle sourit, un peu dépassée comme toujours avec lui. Entre ses doigts les mèches claires, qui ont foncé avec l'eau. Elle se penche pour un baiser plume sur le front.

Je

Non. Ça aussi, plus tard.

Il s’enfuit déjà, alors qu’elle croyait amadouer l’enfant, c’est l’homme qui prend le pas, qui précipite ses attentes. Pas sur. Surement à sa façon. L’explorateur explore.
Assis maintenant, en tailleur pourquoi pas. Il observe ? Non, il admire Elle, belle et gracieuse allongée plus belle qu’une autre, que toutes les autres dirait-il.
Il le dit.

Plus belle encore, plus que les autres je crois, je ne suis pas sur, je n’ai connu que celle qui…
Elle est partie vous savez.

Et puis, il oublie ou il fait semblant. Il passe à autre chose. Déboucler le pantalon d’Elle. Comme ça. Ça lui a pris d’un coup, comme un enfant curieux, il veut tout connaître, savoir, voir et gouter. Alors, il défait le bouton de garde, et tire le zip lentement et la regardant Elle.
Le zip en bas de course, il enfonce sa main sous le tissu mouillé sur l’autre tissu, l’autre peau, comme ça, comme tout à l’heure, il y a un instant. Pour voir, savoir, gouter.
C’est trop vite ? Il lui demande avec les yeux, le cœur qui traine aussi par là, dans son regard de petit qui joue les grands.

Il s'éloigne encore ? Jude, douche écossaise. Elle le contemple pendant qu'il l'admire. Et puis... Il parle de l'autre.
Éclat de silex dans les yeux verts, pli assassin de la lèvre, mains crispées autour des épaules, elle va parler. Elle va parler, et ça va faire mal comme un coup de poing dans la gueule.

Mais... mais qu'est-ce qu'il fait ?

On en était où déjà ? Ah oui, la colère. A propos de quoi déjà ? Elle ne sait plus. Son œil du nombril cligne deux ou trois fois avant de se refermer, effarouché. Ses yeux d'en haut plongent dans le ciel, puis dans son regard à lui qui pose une question, le ciel encore.
De deux coups précis sur ses talons, elle envoie ses rangers voler à quelques pas.


Elle fait la moue, il fait celui qui ne voit pas. Il a oublié, elle est partie. Il reste Elle qui est belle, et là.

Il n’a pas vu pointer la gifle, pas de non dans ses yeux iris malachite. Alors, il tourne il laisse sa main là où elle est blottie au chaud. Si chaud ? Pas encore. Juste là, il recule comme un Bernard l'ermite et sur la pointe des doigts, il soulève l’élastique cousu au tissu, et s’enfonce une fois encore téméraire sous le tissu fin presque raffiné. Comme ça. Comme tout à l’heure, pour voir, savoir, gouter. Avec la main sur sa peau lisse par ici, il sait maintenant, il verra plus tard, et il goutte des doigts, la peau nue lisse sur la paume. Et là, pas lisse, comme le crane d’Elle.

Comme ça, il retire sa main sans froisser Elle, la plus importante. Et accroche ses mains au jean pour le faire descendre sur ses cuisses, un ralentissement aux genoux pour un final sur les chevilles. Le jean s’abandonne aux pieds d’Elle.
Comme ça.

Maintenant elle ne porte plus rien qu'un peu de tissu blanc, mouillé de surcroît, autant dire nue. Les bras croisés sur sa poitrine, les yeux dans le ciel, les joues enflammées, elle pourrait poser pour une allégorie de la pudeur. Son cœur bat à si grands coups qu'il peut voir vibrer la peau de son ventre.
Elle lui jette un regard qui gâche un peu la belle image, un regard tendre et complice.
En un instant, elle est à genoux devant lui. Elle le débarrasse de sa chemise et en profite pour lui voler deux ou trois baisers ; et puis elle reprend la pose, miss Pudeur version allongée.

Il ne lui reste qu’à admirer, et il admire. Il perd le regard d’Elle, quand elle lui enlève sa chemise. Il le retrouvera tout à l’heure. Plus tard au moment venu. Pour l’instant, il regarde avec ses yeux à lui, étranges et incompréhensibles pour la plupart des gens. Un regard émerveillé, apprivoisé. Il est à Elle. Il le sait. Soudé.

Ses mains à lui, se posent sur Elle. Sur ses cuisses, juste là, au dessus des genoux. Comme ça. Voir, savoir, gouter.
Il en retire une pour recoiffer des mèches humides tombées sur son front.
L’autre bouge, un peu, il apprend le contact de la peau sur sa main. Sa chaleur qui s’échange avec Elle, de l’une à lui. Il goute. Toutes ses sensations nouvelles, il a le vertige, trop chaud, trop… un peu trop de choses qui se bousculent dans sa cervelle.

Sa mèche remise en place, il veut voir, savoir, gouter. Il enlève la culotte, comme ça. Cuisses, genoux, chevilles, jeans. Elle soulève à peine ses hanches. Et lui admire, Elle. Émerveillé. Mille éclats dans les yeux. Milles saveurs dans la tête. Un parfum d’inconnu dans l’air libre.
Il la trouve simplement belle.

Il ramasse sa chemise, et couvre Elle, avec.
Il s’allonge à coté d’elle.
Sur le coté, le visage couché sur son bras replié.
Il la regarde, des lueurs et des rêves plein les yeux.

Pour l’instant, c’est… comme ça.

Elle émet une inspiration sifflante, un peu comme si on venait de l'arroser d'eau glacée juste après une douche brûlante. D'ailleurs, elle est froide, la chemise détrempée, après la caresse... du soleil.

Elle se tourne sur le côté, le visage sur son bras replié, symétrique.

Son autre main émerge de la chemise. Du bout du doigt, elle suit le contour du menton, râpeux comme la langue de son chat.

Pourquoi ferait-il ça ?
Tous les hommes sont ainsi alors ?
Une femme offerte c’est une femme qu’on prend ?
On prend même les femmes qui ne s’offrent pas.
Il faut le faire parce qu’elle le désire ?
Il faut toujours répondre à des attentes ?
Jude la désire. Oh bien sur qu’il la désire. Sauf qu’il n’est pas comme les autres.
Il pleure quand il faut rire. Pourquoi ? Parce qu’il voit autre chose, peut-être ce que la plupart des gens ne voient pas. Ce quelque chose qui se trouve blotti derrière un masque, peu importe la forme, la couleur du masque.
Un enfant qui tombe, c’est drôle, ça fait rire les autres enfants, et tous rient. Sauf Jude. Peut-être que c’est un enfant qui rentrera chez lui comme tous les autres enfants. Peut-être qu’un gouté avec des biscuits l’attendra comme tous les autres. Peut-être qu’avant de dormir, sa mère enfoncera ses ongles dans son bras jusqu’au sang, jusqu'à déchirer sa peau, pour lui faire mal, sans raison, pas comme tous les autres.

Il sourit devant Elle. Sous son doigt qui dessine un contour de son menton.
Elle a déjà ôté son masque, il n’a plus besoin de pleurer. Peut-être plus tard, quand il apercevra un masque qu’il n’avait pas imaginé.
En attendant, il reste avec des questions plein la tête, et la patience de la prendre en lui demandant « s’il vous plait ».

Elle lui rend son sourire. Ni fâchée, ni déçue.
Elle se rapproche, niche son crâne sous le bras replié de Jude. A tâtons, elle cherche sa main et la pose sur son absence de cheveux.

Il voit un volcan en éruption. Il voit une Kim géante qui verse un seau d'eau géant sur le volcan et l'éteint dans un sifflement de vapeur. Elle le regarde et lui adresse un clin d'œil triomphal.

Elle murmure dans son cou : Je suis plus forte que mon corps.

Jude boit du sirop grenadine dans les yeux d’Elle.
Elle aime l’écouter autant que la regarder.
Il a vu. Il saura après. Il gouttera plus tard.

Il aperçoit le mur derrière elle. Immense et imposant. L’eau qui s’en échappe et dévale la pente pour venir mourir dans un boucan d’enfer et de vapeur.

Il lui dit avec ses yeux. Il ne pourra jamais voler tant qu’il y aura un mur quelque part.

Alors, il la rhabille, il fait le chemin à l’envers, presque adroit. Tant pis s’ils sont mouillés, les habits, et les corps de désirer.
Délicat, il la relève, et la salue d’un air de vouloir aller plus loin avec Elle. Nulle autre.
Au-delà de tous les murs, de toutes les entraves. Il veut voler.
Et manger des pastèques.

Il l’enlace et la blottie contre lui, ferme les yeux contre sa joue, et regarde un envol d’oiseaux. L’instant dure une éternité. Les oiseaux sont nombreux.
Il glisse sa main dans la sienne, enfonce ses doigts entre les siens, et la referme. Indessoudable.
Il s’arrache à son corps blotti, et l’attire par la main, vers plus loin, loin des murs et des prisons.


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