Trois noms jouaient au manège dans ma tête, passant et repassant, tournant lentement, se ramenant régulièrement au premier plan de mes pensées.
Une ruelle. Un bar. Une personne à contacter.

Informations mystérieuses glissées à mon oreille et dont je ne savais que faire. D’un côté l’affaire m’intriguait, je serais volontiers allé jeter un coup d’œil... Seul bémol : ça sentait le coup foireux à plein nez.

Faute de mieux je laissais donc le tout tournoyer dans mon esprit, espérant qu’il ne le transformerait pas en une bouillie infâme et incompréhensible, tentant juste de ne rien oublier.

Évidemment, dans ces cas là la charmante demoiselle qui vous file le tuyau peut jamais vous faire un post-it.

Avec ma mémoire légendaire j’allais me planter d’adresse, me perdre bêtement, et me retrouver dans le bureau des N.O.D à devoir convaincre que le bleu fluo c’est très commun comme couleur d’yeux.
Ouais… tant qu’à faire on allait éviter de mourir tout de suite.

D’un pas décidé, je pris donc le chemin menant aux anciens réseaux souterrains de Novlangue.

Cette fois c’était officiel, je venais de sérieusement péter un câble !!!!
Toujours très sympathique de se découvrir des tendances suicidaires…
Enfin… ces temps-ci je découvrais un peu trop de trucs à mon propre sujet que je ne soupçonnais même pas deux semaines plus tôt.

L’allure fringante du type qui croit qu’il sait où il va, j’arpentais l’endroit. Trop facile. J’allais trouver ce bar en moins de deux et j’aurais le fin mot de l’histoire.
Disons presque en moins de deux en fait, accordez moi cinq minutes de plus… ou cinq heures…

Ni notion précise du temps, ni sens de l’orientation… y a pas à dire, je les accumulais…

Après maints tours, détours, retours, en long, en large, en travers, de l’autre côté, je m’arrêtai, contraint de me rendre à l’évidence : j’étais paumé.
Une petite partie de moi, celle possédant encore suffisamment de raison pour avoir flairé le plan foireux, me glissa un petit "J’t’avais prévenu" moralisateur avant s’en aller bouder.
Comme si c’était le moment de me faire lâchement abandonner par l’infime trait de ma personnalité pouvant m’être utile en cas de pépin !

En plus de cela je constatai que j’étais revenu à mon point de départ.
Il était temps que je me cale dans un coin tranquille et que je réfléchisse un peu à la suite des opérations avant de reprendre la route au hasard.

J’avisai un bar sur ma gauche. Parfait, ça ferait bien l’affaire.
Je poussai la porte et entrai, ne m’apercevant pas que l’ironie du sort venait de me jouer un beau tour. Le bar en question était celui que je cherchais depuis le début…

Sous les regards en coin lancés par quelques habitués, je pris place au comptoir.
J’ajustai les gants de cuir noirs que je portais pour dissimuler mes doigts bioniques. M’observant attentivement, le barman vint prendre ma commande.
Peu coutumier des pubs, j’hésitai un instant avant d’opter pour une bière.

Dans un coin du pub, Kim est engagée dans une partie de bras de fer endiablée. Une bougie allumée de chaque côté des poings serrés des adversaires leur assure une motivation suffisante, celle des spectateurs étant assurée par un bookmaker qui prend les paris. Ambiance.

Le gros lourdaud assis en face d'elle a des biceps épais comme ses cuisses, mais elle ne se laisse pas faire. Arc-boutée, elle donne tout ce qu'elle a, le front luisant sous l'effort, bruyamment encouragée par une honnête moitié de l'assistance. Rien n'y fait : son poing finit par s'écraser violemment sur la bougie, l'éteignant sur le coup. Elle se lève, serre la main de la montagne de chair qui vient de la battre à la loyale et se dirige vers le bar. Ça donne soif tout ça... Non, pas de pseudo-whisky, plutôt une pseudo-bière.

L'inconnu à côté d'elle s'est commandé la même chose. Elle l'observe en allumant posément un cigarillo. Les yeux fluo, ça veut rien dire, même les NOD sont assez malins pour mettre des lentilles.

T'es nouveau dans le coin ? lance-t-elle en coup de sonde.

Je balayai la salle du regard, m’imprégnant de l’atmosphère du lieu.
Au fond de la pièce un attroupement c’était formé autour de l’une des tables où se livrait apparemment une partie de bras de fer. En fin de compte je n’avais pas trop mal choisi mon endroit, l’ambiance me convenait bien… si on oubliait le regard du barman que je trouvai décidément trop insistant.
Alors quoi ?! J’avais un truc pas net sur la figure ?!! …
… Ha… oui… effectivement… les yeux bleu fluo…
Je n’étais pas encore vraiment habitué à ce détail… et j’étais pas prêt de m’y faire.

J’en étais là de mes réflexions, buvant une gorgée de bière, quand une superbe femme se posta à côté de moi au comptoir pour passer commande. Elle engagea la conversation.
Visiblement j’avais la côte ce soir.

Habituée du coin ? Probablement.

*Nouveau ? Oui, plus ou moins, en gros …

« - … j’ai vu de la lumière et j’suis rentré. »

… Passer pour un idiot dès la première réplique ? Ça c’était fait.
Cette manie récente de terminer à voix haute les phrases issues de mes obscures pensées devenait agaçante. Habitude d’autant plus gênante qu’il m’arrivait, comme à tout le monde je suppose, de nourrir des états d’âme plus ou moins inavouable.
Là il s’agissait juste d’une vague boutade que je m’apprêtais à me lancer à moi-même avant d’envisager une réponse plus sérieuse.

Je tentai de rattraper le coup et de regagner un minimum de crédibilité.

« - En fait, petit… contretemps dans mes affaires actuelles. Du coup me suis dit que je pouvais m’accorder une petite pause. »

Ouais… la version plus recherchée de "Bah en fait, j’suis un peu con, j’avais plus ou moins rendez-vous quelque part pas loin et j’me suis complètement paumé."

Oulà, il est carrément bizarre, celui-là. La méfiance habituelle de Kim (une banale paranoïa aiguë) s'en trouve multipliée par dix.

T'as vu de la lumière et t'es entré. Au Murphy's.

Tu te baladais dans les sous-sols pour profiter du paysage, j'imagine.

Elle tire une bouffée, boit une gorgée, tente un de ses regards flippants. Manque de bol, question intensité lumineuse de la pupille, celui-là la bat à plate couture.

Qui t'a indiqué ce bar ?

A défaut de compter sur ses yeux, elle fait rouler les muscles de ses épaules sous son débardeur.

Le Murphy’s… … Le Murphy’s ? … Le Murphy’s !!!!
Merde… ce nom là me disait quelque chose !
A tout hasard ça serait pas le fameux bar indiqué par ma jolie inconnue et que je venais de passer des heures à chercher ?!
Je me penchai sur l’hypothèse et fus pris d’une forte envie de me frapper la tête contre le comptoir, ou le mur, au choix, en me traitant de con. Si j’avais su qu’il me suffisait de rentrer dans un pub en me fiant uniquement à la chance j’aurais appliqué plus tôt cette technique douteuse.

Bon, très bien, j’avais avancé, c’était le point positif. La ruelle, le bar, maintenant je n’avais plus qu’à vérifier le nom. J’aurais pu carrément demander le sien à mon interlocutrice, voire essayer de savoir si elle connaissait la personne que je devais rencontrer.
Un problème se posait toutefois. Certes, j’étais au bon endroit, cependant ça ne signifiait pas que je pouvais déballer mon histoire à la première venue, aussi charmante soit-elle.

« - Ça dépend qui le demande… »

Répondis-je simplement, un petit sourire se dessinant au coin de mes lèvres, le ton légèrement hautain.

*Oui, c’est ça Soren, t’as raison, fait le malin…*
M’auto-sermonnai-je au passage.

Kim en reste buggée un moment. Mais c'est qu'il manque pas de culot, le nioubie !

Franck ! Matt ! Josh ! Ramenez vos fraises les mecs, on a un ptit malin...

Les armoires à glace qui continuaient à s'amuser dans le coin du bras de fer s'approchent, toute la salle concentre son attention sur Soren, et certains clients viennent se joindre à la fête.

Kim masse ses phalanges, narquoise.

Le coquinou veut pas me dire comment il connaît ce bar, explique la rebelle à ses acolytes. Il se méfie, j'ai trop l'air d'une NOD sûrement.

Rires gras.

Comme tu vois, ptit malin, tout le monde me connaît ici, et c'est le Murphy's, pas le Wonderland, t'as remarqué ?

Nettement moins hilare, tout d'un coup :

Qui t'a parlé de ce bar ?

Franchement, des fois je me dis qu’une restructuration du fonctionnement de mon cerveau me ferait pas de mal. Par exemple confier le commandement à mon côté censé, cette partie de moi qui flaire plutôt efficacement les plans foireux, qui m’engueule intérieurement lorsque je fais une connerie, et laisser bouder en arrière plan mes penchants kamikazes.
Malheureusement il faudrait s’accommoder de l’organisation actuelle.

La situation se compliquait, et pas qu’un peu.
La jeune femme n’eut quasiment qu’à claquer des doigts pour qu’une bonne moitié des clients présents se retrouve instantanément autour de moi.
Fatalement je faisais moins le fier encerclé de la sorte.

Note pour plus tard : quand on sait pas dans quoi on s’est embarqué on se la ferme.

J’eus un petit rire nerveux, sondant un instant l’assistance, essayant de juger à quel point j’étais dans la merde.
Disons que si tout ce beau monde s’énervait pour de bon…

« - Je… du calme. On doit pouvoir en discuter… »

Vaine tentative pour détendre l’ambiance. Rire, nerveux toujours, en guise de ponctuation.
Le souci c’était que je ne connaissais même pas l’identité de la jeune femme qui m’avait fourni l’information. J’espérai qu’une simple description suffirait.
Et s’ils ne me croyaient pas ? … … Chaque chose en son temps. Ça j’y penserai plus tard.

« - Sais pas qui c’était. M’a pas donné son nom… Une femme. Brune… »

Commençai-je avec un débit de parole trop rapide, conscient que les détails que je mentionnais ne seraient pas jugés satisfaisants.
Et soudain, un flash dans mon esprit, le truc par lequel j’aurais dû commencer.

« - Elle avait une marque, une sorte de cicatrice, je crois. Une cicatrice qui… brillait !!? »

Voilà. Courageux mais pas téméraire.

Aussitôt la combattante au poil ras se détend, un sourire soulagé se dessine sur ses lèvres pleines, et sa phalange de gros-bras se disperse.

Haa, Siobhan ? Eh ben fallait le dire tout de suite, mon lapin.

Elle lui envoie une claque sur l'épaule.

Je t'offre un verre ? Et tu me raconteras comment tu t'es retrouvé avec ces yeux fluo, ça marche ?

Elle se rassoit au comptoir, prend une gorgée de bière.

Ah au fait... Kim.

Elle tend la main.

A la place du joyeux massacre auquel j’avais tenté de me préparer psychologiquement, j’eus droit à une tape amicale sur l’épaule.
Pour un retournement de situation…

Belle montée d’adrénaline. Je n’étais plus habituée à ce genre d’émotions fortes.
Ce ne fut qu’au moment où je repris brusquement mon souffle que je pris conscience d’avoir retenu ma respiration l’espace de longues secondes.

« - Soren. »

Me présentai-je, prenant la main que la jeune femme me tendait et la serrant aussi vigoureusement que me le permettait mon état actuel. Suffisant pour ne pas passer pour une lopette, éviter d’avoir l’air du type complètement paniqué par les évènements.

Je laissai Kim me payer un verre. La prochaine fois, promis, je penserai à me montrer un peu gentleman… quand ma situation serait moins précaire… et à condition qu’on ne m’ait pas fichu une trouille bleue juste avant.

Installé au comptoir je pus donc commencer le récit de mes mésaventures.
Je m’étais montré injuste envers Siobhan, ne lui accordant pas même le bénéfice du doute alors qu’elle avait juste voulu me diriger vers les bonnes personnes. Je ferai en sorte de me faire pardonner.


Je racontai à Kim comment de simple employé d’usine je m’étais soudain retrouvé sujet d’expériences pour le compte de cette même usine. Je m’arrêtai un instant sur le réveil brutal, parlai un peu de ma fuite sans toutefois mentionner ma rencontre avec Lovelia. Ce détail là je le gardai pour moi.

« … donc, je pense qu’ils vont essayer de me choper. Sais pas vraiment de quels moyens ils disposent. Du coup… bah pour l'instant j’me débrouille comme je peux.»

En réalité je ne savais pas grand-chose de cette affaire. Juste qu’il valait mieux que je reste discret un moment et ne repasse chez moi qu’en coup de vent.

« - Pour l’implant, totalement HS il me semble. Quoique j'ai encore un doute. »

J’hésitai un instant avant de livrer les derniers éléments.

« - Sinon, y a aussi un autre … détail je dirais… »

Plutôt que me perdre en de vaines phrases je retirai le gant de ma main gauche, la tenant sous le rebord du comptoir afin de ne pas trop attirer l’attention. Apparemment je ne risquai plus grand-chose ici, cependant je n’avais pas envie d’afficher ma main aux trois doigts bioniques à la vue de toute la clientèle du pub.

Kim examine les trois doigts spéciaux de son nouvel ami, sans se gêner pour mettre le nez dessus.

Putain, ils ont massacré la partie organique. Du boulot de cochon, ça. Tu crois qu'ils cherchaient à faire quoi, exactement ? Parce que là, ça ressemble juste à un petit jeu de sadiques qui s'emmerdent.
Ils fonctionnent ? Si jamais t'as un problème technique, va voir Emilie, elle...

Main sur l'épaule, salutation enjouée et invitation non moins enjouée à vider encore un peu le porte-crédits de Kim.

Tiens, quand on parle de la louve... Oui, ton p'tit protégé est arrivé jusqu'ici. Faudra penser à leur donner ton nom, la prochaine fois, parce qu'on avait pris un mauvais départ...

Elle commande trois nouvelles bières et lève la sienne.

A Sio, notre meilleure recruteuse à ce jour. Sans compter que grâce à elle, on a la lumière et l'eau chaude tous les jours, maintenant.

Et à la révolution, bien sûr !

Kim examina ma main sous toutes ses coutures… sans mauvais jeu de mot.
Je la laissai faire, quoi qu’un peu gêné.

Le fait qu’elle me confirme l’aspect bâclé du travail effectué sur ma main gauche m’arracha un léger frisson. Je savais pertinemment que le boulot était dégueulasse, pas besoin d’être chirurgien pour le remarquer, seulement me l’entendre confirmer par quelqu’un n’était pas anodin et attisa ma rancœur vis-à-vis de mes tortionnaires.

« - Un test, un prototype peut-être. Je sais pas. En tous cas je pense que quelque chose à pas tourné comme ils l’espéraient pendant l’opération. Mais honnêtement je peux que supposer. »

Je pliai puis dépliai mes doigts dans un mouvement désordonné.

« - Ça a au moins l’air de fonctionner. Après faut le temps que je m’habitue. »

Je n’eus pas le loisir de poursuivre mes explications. Une troisième personne se joignit soudain à nous au comptoir.
Je marquai un temps d’arrêt, reconnaissant Siobhan.
Kim enchaina, commanda une nouvelle tournée, leva son verre à la révolution.

L’idée me plait.
Oui, depuis que j’étais de nouveau capable d’avoir mon opinion propre sur le monde qui m’entourait, depuis que je pouvais me rendre compte des horreurs s’y déroulant chaque jour, un sentiment d’indignation s’élevait peu à peu en moi.

« - Pour info : le clown a un prénom. C’est Soren. »
Adressai-je à Siobhan, cynique, en réponse à son petit trait d'humour.

Puis, regardant tour à tour les deux femmes.

« - A priori j’ai rien contre le fait de me faire recruter, je doute pas que ce soit pour la bonne cause, tout ça, tout ça… mais… comment dire… Bah je voudrais bien savoir en quoi ça consiste et j’serais pas contre une ou deux explications. »

A vrai dire, je ne savais pas exactement où je débarquais. J'avais vaguement entendu parler d'un groupe de rebelles opposés au gouvernement actuel. Toutefois, les seuls connaissances que j'en avais étaient les bribes d'informations que le gouvernement en question voulait bien laisser filtrer au sujet de ses détracteurs. Pas le point de vue le plus objectif qui soit...

Kim lève un sourcil.

PNL ? Si c'est Poing de Nègre dans Lague, alors oui, je suis spécialiste.

Elle se retourne et envoie un regard-qui-fait-flipper à plusieurs clients visiblement surexcités.

On se calme les gars, son trip c'est les douches chaudes, z'avez mal entendu ? Le premier qui lui met une main aux miches sans son accord exprès, je cogne.

Se retournant vers Soren :

Comme ça, tu auras une démonstration de mes talents en... PNL.

Alors, ouais, comme dit Sio, le gravillon dans la godasse, c'est ça qu'on est. Tant qu'on n'a pas les moyens d'être le gros pavé dans leur tronche. Tu peux l'être comme ça te chante, t'es pas obligé de poser des bombes partout, encore que, y en a qui aiment. T'es pas obligé d'être violent du tout, en fait. J'en connais un, il peint sur les murs, full stop.

L’avantage c’est que ça a pas l’air triste dans le camp des gentils.

« - Suis pas contre une démonstration… tant que je joue pas le cobaye ça me va. »

Rétorquai-je dans un léger éclat de rire face aux paroles de Kim.
J’en avais déjà fait l’expérience, il valait mieux ne pas trop la chercher.

Quoi qu’il en soit, le discours que me tenaient mes deux nouvelles acolytes produisit son petit effet.
Alors que je réapprenais tout juste les notions de sentiments et de pensée propre, redécouvrant le tout avec l’émerveillement d’un gamin, elles me faisaient miroiter des choses auxquelles je ne pouvais résister.

La rébellion, le petit côté chevaleresque que cela prenait immédiatement dans mon esprit à présent avide de liberté, cette satisfaction que l’on pouvait éprouver à défendre des causes justes.
C’était con à dire, mais sur le moment cela me parut être l’évidence même : c’était ça que je voulais faire.

Quoi d’autre ?
A bien y réfléchir, vers quoi d’autre pouvais-je encore me tourner ?

« - Agir dans l’ombre. Botter le cul des méchants. Ça me parait dans mes cordes. Où c’est qu’on signe ? »

Lançai-je avec enthousiasme.

Je devins ensuite un brin pragmatique (non, ça ne m’arrive pas souvent mais j’ai mes quarts d’heure).

« - Puis, chais pas, même si chacun mène ses petites actions comme il l’entend vous avez bien un genre de "QG des Rebelles" , truc un peu top secret dont pas grand monde est censé savoir où ça se trouve ? »

Il n’y avait aucun mal à se renseigner que je sache ?! Surtout que je venais d’accepter d’adhérer au club…et que, je devais l’admettre, un léger détail me turlupinais…

« … c’est que je suis un peu à la rue ces temps-ci… »

Hé meeeeeerde… le retour de "cette partie de la phrase j’étais censé la garder pour moi-même si je le pensais très fort".
Une telle déclaration balancée comme ça du néant ça faisait un peu le mec qui s’incruste ; non ?

Il me semble que c’est pour ça qu’en temps normal toutes les conneries auxquelles on peut songer à la seconde ne sont pas accessibles à autre que soi-même.

On se calme les gars, son trip c'est les douches chaudes, z'avez mal entendu ? Le premier qui lui met une main aux miches sans son accord exprès, je cogne.

Ouf. Pas trop l'habitude des sensations retrouvées sans implant. Alors des fois... Je dérape un peu, niveau vocabulaire.
Et JUSTE niveau vocabulaire, si vous voulez tout savoir.

- Merci Kimignonne. T'es un cœur.

... Et moi, je suis une suicidaire.
Vite ! Une diversion !

« - Agir dans l’ombre. Botter le cul des méchants. Ça me parait dans mes cordes. Où c’est qu’on signe ? ... Puis, chais pas, même si chacun mène ses petites actions comme il l’entend vous avez bien un genre de "QG des Rebelles" , truc un peu top secret dont pas grand monde est censé savoir où ça se trouve ? … c’est que je suis un peu à la rue ces temps-ci… »

... Ahhhh, mais il y a pire que moi, hein ?
Bon, intervenons avant que Kimetsonpoingdanslepif ne s'énerve.

Grand sourire

- Ouais. En fait, c'est moi le chef des rebelles. Kim est mon garde du corps. Si si si. ... Tu gardes bien mon corps, non ?

Léger blanc.

- Bon, ça... c'est du pipeau, t'auras compris. Par contre, te trouver une piaule doit être du domaine du possible.

Je m'affale contre l'épaule de Kim.

- N'est ce pas ? Hein, Kim, dis ?

- Merci Kimignonne. T'es un cœur.

La Kimignonne en question hausse un sourcil et se dissimule derrière une bouffée de fumée.

Qu'est-ce qu'elle tient mal l'alcool, c'est impressionnant.

Devant les démonstrations d'affection de la rebelle aux veines fluo, Kim lui tapote la tête et ajoute à l'intention de Soren :

Des piaules vides, y en a des tas. Bon, faut un peu nettoyer et c'est pas prévu pour être des piaules, au départ. Parfois des débarras, des réserves, parfois des salles de contrôle ou des trucs du genre.

Cela dit, j'ai cru comprendre que tu pourrais partager celle de Sio, hein, c'est ça, Sio, j'ai bien tout compris ?

Un prêté pour un vomi.

Je sifflai d’un trait ce qui restait de ma bière.
Finalement j’avais bien fait d’évoquer mes soucis d’hébergement, même si ça n’avait pas été tout à fait volontaire, puisqu’entre deux plaisanteries Sio me laissa entendre que me trouver une petite place serait envisageable.

Quant à Kim, elle semblait désespérer légèrement, entourée d’une demoiselle à l’alcool joyeux et d’un apprenti rebelle surexcité.
La belle équipe.

« - C’est parfait. Partager une chambre avec la chef des rebelles en personne serait un honneur. Ça ne se refuse pas. »

Déclamai-je d’un ton faussement cérémonieux, adressant un sourire amusé à Kim suivi d’un clin d’œil moqueur que je réservais à Siobhan.

« - J’aménage quand ? »

Déraper ? … Ho… si peu…

Cela dit, j'ai cru comprendre que tu pourrais partager celle de Sio, hein, c'est ça, Sio, j'ai bien tout compris ?

Niu ?
Parta-quoi ??

Heu, mais... C'est que c'est tout petit chez moi et...

« - C’est parfait. Partager une chambre avec la chef des rebelles en personne serait un honneur. Ça ne se refuse pas. ... J’aménage quand ? »

Méheuuuuuu !
... J'ai jamais vécu avec quelqu'un que je connaissais pas, moi ! ... Bon.
C'est peut être pour le tester. Kim est du genre soupçonneux, donc...

Soupir.

- Ok. Mais j'espère que tu ronfles pas, sinon tu vires sur le paillasson direct.

Namého.

Kim en reste comme deux ronds de flan.

Ah mais tu l'héberges pour de vrai. Ah OK. Je vois je vois. Remarque vous êtes assortis, point de vue couleurs, ça doit être un signe...

De nouveau narquoise, elle donne une bonne tape amicale à chacun dans le dos et descend de son tabouret.

Bonne b... soirée les jeunes ! Moi, je vais retrouver mon chat.

Et la voilà partie, avec son cigarillo et son sourire en coin.

Personnellement je déconnais quand je parlais d’aménager chez le pseudo chef des rebelle. De même que Kim lorsqu’elle avait lancé l’idée ; non ?
Au vu de sa réaction oui c’était bien ça. Pour une fois que je ne comprenais pas tout de travers.

Par contre, Sio avait pris la vanne au sérieux.

Et je n’eus pas le temps de répliquer que Kim nous abandonnait. Quand j’ouvris la bouche pour tenter de dire quelque chose elle était déjà loin.

A présent en tête à tête avec Siobhan je me tournai vers elle, quelque peu perplexe, haussant un sourcil.

« - Euh… du coup on fait quoi ? »

Super éloquent j’avoue…