Henry n'avait pas mentit, ils avaient mis une demi heure à sortir du quartier de Résidence Evil. Le véhicule s'arrêta à quelques rues du Cozumel et le chauffeur coupa les moteurs. Phil regarda sa montre, malgré les bouchons, ils étaient tout de meme en avance de dix minutes, il en profita pour fumer une cigarette puis il sortit de la voiture.

- Allez les gars, dit il. J'ai faim, on va se faire un petit déjeuner ! Il parait qu'ils ont de supers quiches lorraines.
- C'est pas censé être mexicain comme restaurant ? demanda Henry en sortant à son tour.
- Si, mais bon va comprendre.

Ils dirigèrent tous les trois vers le Cozumel et entrèrent.

Spoiler:

Les trois personnes sortirent donc de leur voiture flambante pour se diriger vers le restaurant, sous l’œil de la cyborg qui ne se montrait pas encore.

Elle avait donnée rendez-vous, elle avait réservé une table, mais elle préférait voir les choses arriver ... Comme en cas de problèmes.

Elle les suivit donc. Gardant une robe dérobée dans un magasin de haute-couture pour l'occasion et qui, comme toutes les pièces de luxe de ce 22ème siècle, avaient tendance à laisser le plus de peau possible exposé à l'air libre. Pour l'occasion, il n'était nulle question de dévoiler à l'air libre tout son attirail de prothèses robotique, et elle ressemblait à la parfaite petite humaine.

Et cela aurait pu rester de même si un subtil grésillement n'avait pas précédé l'apparition dans le dos des trois garçons d'Oktane, juste à leur suite. Comme si elle les avaient précédés depuis la voiture. Le camouflage optique ... Quelque chose qui, entre de bonnes mains, était fort utile et amusant.

" En fait, on dit "ouiche lorraine" "

Quelque chose à déconseiller aux cardiaques aussi.

" C'est le patron, il est super fort. Y'a 3 ans, il a gagné le concours du meilleur cuisinier asiatique de la ville avec un Méchoui. C'est vous dire la qualité du restaurant. "

Et elle entra à leur suite, allant demander sa table au maitre d'hôtel moustachu avec son énorme sombrero sur la tête, directement en espagnol.

Un sombrero par-dessus un costume en queue-de-pie ... Le mauvais goût n'avait plus de limite. Le maitre d'hôtel vérifia, puis les invita à le suivre. Oktane se retourna, faisant signe aux garçons de la suivre.

" Eh bien ... Davaĭ. "

La pédanterie, peut-être le plus gros défaut d'Oktane depuis qu'elle a attrapé un court-circuit émotionnel.

Phil échangea un regard amusé avec Henry lorsque Lester rompit le silence. Il était peut être taciturne par moment et à tendance dépressive notoire, mais il savait faire les bonnes remarques. Ils étaient effectivement là pour travailler et ce silence commençait à être lourd.
Henry posa sa mallette sur la table, l'ouvrit, fit quelques manipulations, la referma et fit un signe de tête à Phil. Le brouilleur de communications était en place.
Les deux automates jubilaient à chaque nouveau gadget qu'on leur présentait, le technologie de cette époque permettait des choses incroyables dont ils avaient toujours rêvé. Le seul point faible de cette époque proche de la singularité était néanmoins que vous ne saviez jamais si on ne venait pas d'inventer un nouveau gadget capable de surpasser le votre.

Mason posa ses coudes sur la table, s'éclaircit la gorge et commença :

- Bien, maintenant que nous pouvons parler, allons-y. Comme vous le savez, j'ai injustement un conseil d'administration sur le dos, ces vautours se sont arrachés mes établissements durant mon absence, et cela, je ne peux le permettre. Ces rats ne font rien à part dire oui ou non, ils sont répugnants.

Il prit la mallette d'Henry, chercha parmi les dossiers et jeta deux photos sur la table.

- Catherine Miller et Ryan Wright. Anciens collaborateurs auprès de la New European Weapons Manufactory. Ils ont décidé un jour de se reconvertir et ont acheté des parts des Entreprises Mason. Miller se rend de plus en plus souvent à l'assemblée, elle s'arrange apparemment pour rester en place et me mettre des bâtons dans les roues. Nous savons qu'elle fréquente également l'opéra des Valkyrie, chose qui peut être exploitable.

Il regarda Isadora, il ne voyait toujours pas ses yeux, cela irritait, il aimait voir le regard de ses interlocuteurs.

- Et de votre coté ? lui demanda-t-il. Des informations intéressantes ?

L'irritation que pouvait lire la cyborg dans les yeux de l’humain était délectable. Si d'un côté, rien ne filtrait, de l'autre, ils n'étaient pas vraiment un obstacle, et elle laissa échapper un petit sourire satisfait en commandant son plat.

" Et de votre coté ? Des informations intéressantes ? "

" Mis à part qu'en tant qu'anciens de l'armement, ils n'ont pas du apprécier les commandes du NOD à Teckard & Moss et à Selvetis ... C'est moche d'avoir subi une privatisation sauvage. Enfin... "

Elle sortit de son décolleté une poignée de photos d'une fille à l'air bovin.

" Une autre de vos ... "collaboratrices". Paris Hilton, troisième du nom. Les deux premières doivent avoir tellement marquées l'Histoire qu'à part des condamnations pour consommation de substances illicites et des vidéos franchement osées, je n'ai rien trouvée ... Toujours est-il qu'elle semble avoir de qui tenir, puisque qu'elle ne sort jamais de chez elle sans avoir le nez tout blanc ou un dispositif d'injection intra-cutané ... "

Elle soupira en regardant la photo où l'on pouvait constater un plein saladier de poudre blanche et la fille, la tête plongée dedans.

" Faudra qu'on m'explique comment elle a pu seulement obtenir assez d'argent pour se payer une place dans votre conseil d'administration ... "

Isadora marquait un point. Phil eut un petit sourire mêlé à une moue de dégout, amusé par la remarque mais désappointé par cette vérité.

- Oui, dit-il en regardant les photos. Il faudra qu'on me l'explique aussi. Mais elle n'est pas réellement importante pour l'instant. Laissons faire sa gourmandise pour la poudreuse, avec un peu de chance elle nous fera une overdose.

Phil reprit les photos, rangea les dossiers et fit signe au serveur de venir.

- Vous m'excuserez mais j'ai faim, dit-il.

Une fois la commande passée, Mason reprit.

- Concentrons-nous sur Miller et Wright pour le moment. Ils gagnent la confiance des autres et par la même de l'influence. Si nous leur coupons l'herbe sous le pied, nous gagnerons du temps. Je n'ai que peu d'informations sur Wright mais elles ne devraient pas tarder à tomber. En attendant, mademoiselle Prikovietko et moi allons nous occuper de Catherine Miller. Henry et Lester, vous vous chargez de Ryan Wright.

Henry se raidit et posa sur Phil un regard étonné et interrogateur. Il coupait le groupe en deux ? Ils n'allaient donc pas faire ça ensemble comme au bon vieux temps ?

- Oui ? demanda Phil.
- Rien, répondit Henry, se ravisant. C'est toi le chef.
- Rassemblez le plus d'informations possible en attendant que les miennes arrivent. Faites les fonds de tiroirs, les vilains secrets etc ... Tu connais le truc.

Il regarda Isadora et lui fit un sourire complice.

- Mademoiselle Prikovietko, j'espère que vous êtes prêtes car nous partons après le petit déjeuner.

Spoiler:

Son assiette tout juste terminée et les couverts à peine posés, Henry fut sollicité par Lester afin de quitter les lieux.

— Et sur ce, dit le mentaliste. Bon appétit Monsieur Madame...

Henry se leva et se vit presque trainé dehors, Lester solidement agrippé à sa manche. À mi-chemin de la sortie, il se dégagea aisément de l'emprise du petit nouveau, réajusta son costume et le toisa.

- Et bien mon cher Lester, dit il. Tu m'as l'air bien pressé de commencer, tu as le feu au cul ?

Il se dirigea vers le comptoir et commanda un café à emporter. Il continuait de fixer Lester, allait-il être à la hauteur ? Son patron semblait le penser, mais tant que la recrue n'avait pas fait ses preuves, pour Henry, le doute planait. La théorie est utile, mais il lui préférait la pratique.
Le serveur lui amena son café et ils sortirent.

- Marchons un peu, dit Henry. On trouvera un taxi plus loin et on ira chercher ma voiture.

La rue commençait à vivre, les passants se faisaient de plus en plus nombreux, de même que le trafic aérien. Les choses avaient grandement changées depuis 2040, mais le dimanche restait le dimanche, et Novlangue tardait à se réveiller. Henry regarda sa montre, il était presque dix heures du matin et pourtant on se serait cru beaucoup plus tôt, à l'heure des yeux mi-clos et des moues encore endormies.
Au fur et à mesure qu'ils avançaient le long des passerelles suspendues servant désormais de trottoirs, le numéro deux de Mason engagea la conversation.

- Bon alors, dis moi, comment tu trouves cette époque ? J'ai beaucoup de mal à prendre du recul, pour moi, c'est comme si tout avait toujours existé.

Il s'alluma une cigarette et tendit son paquet à Lester.

- Et qu'est-ce que tu faisais pour le Temple ? Il va falloir que tu me dises ce que tu sais faire si on veut travailler correctement. Oh et un dernier truc, comme ça c'est fait : pas de chichis, pas de courbettes. Ça c'est le truc de Phil, et même si je sais faire, je préfére que ce soit clair et court. Ça te va ?

Mais qu'est-ce ils allaient pouvoir faire de lui ? Lester dressait un bilan catastrophique de ses compétences et Henry n'en était pas plus avancé. Pourquoi Phil l'avait donc engagé ? Certes il avait été plus que drôle et sympathique au Carnival, mais dans ce cas, il aurait en faire un compagnon de comptoir, pas un employé. Mais si monsieur Mason avait vu quelque chose en la personne du mentaliste, il en serait ainsi.

Une chose retint toutefois l'attention d'Henry :

- Tu sondes et brouilles les esprits ? répéta-t-il. Ça c'est plus qu'intéressant. Ça marche comment, si c'est pas indiscret ? Tu influes sur les ondes cérébrales ? Electro-magnétisme ?

Il fit signe à un taxi qui s'arrêta près d'eux ; son véhicule était trop loin pour continuer à pied. Ils montèrent et prirent la direction des appartements d'Henry.