Une cheminée, un bon feu
des couvertures, un bon repas
un canapé et des pantoufles
et cette chaleur... une chaleur qui ne ressemble plus à rien.
Pourtant Liza connait le plaisir de profiter des flammes dont la chaleur pénètre la barrière d'écaille pour redonner vie à son corps gelé, les mains qui brulent et les lèvres bleuies et le nez qui pique comme s'il allait se casser.
Mais dans son rêve, ce n'est pas de cette chaleur là, dont il s'agit. Liza rêve d'autre chose. Mais cet autre chose ne ressemble à rien. Ça la touche, enveloppe ses épaules d'un bouclier et lui fait des papillons dans le ventre.
Mais quelle est la chose qui peut bien faire ça ? Ce n'est pas la couverture, ni les pantoufles. Des objets qui deviennent transparent fasse à "la chose".
Elle est forte, la chose, rien ne semble pouvoir la traverser. Mais la chose se resserre sur elle. Elle devient en pierre. La lézarde se retrouve emmurée vivante dans cette chose plus brillante qu'un feu de cheminé.
Puis la sensation s'efface, les murs s'écartent mais ne sont pas partis bien loin. Ils empêchent la lumière de passer, mais pas l'eau de rentrer.
Les pantoufles sont trempées, la cheminée noyée et le canapé enlisé.
Ce n'est plus un salon, mais un caveau boueux, un marécage emmuré.
Elle essaie d'avancer vers la porte, mais à chaque pas elle s'enfonce. A quelques mètres de la sortis, la voilà bloquée, embourbée jusqu'aux reins, les jambes lourdent qui ne peuvent plus se lever. Elle n'en sortira jamais.


Liza se réveille, les fesses mouillée. Elle est assise dans une flaque, adossée au mur d'une impasse. Son feu est éteint, ne reste qu'une poubelle avec son jus.
Il pleut.
La voilà bien. Comme si le froid ne suffisait pas, il faut aussi que l'eau s'infiltre dans ses vêtements , tout ce qui lui permet de garder le peu de chaleur glané dans un feu de poubelle.
A côté d'elle de l'eau dégueule d'une gouttière percée et éclabousse sa manche, celle du manteau qu'elle a volé. Il n'est déjà plus très blanc et si elle reste là, ce ne sera plus qu'une éponge couleur déchets.
Il faut lever le camp.

A peine sortie de l'impasse, les cheveux plaquées à la figure par une bourrasque cinglante, qu'elle en regrette presque sont cauchemar.

Les mains enfoncées dans les manches gorgées de pluie, les doigts de pieds recroquevillés dans la soupe de chaussette, la moindre parcelle de peau qui dépasse mordue par le vent glacé et les yeux embués, elle avance lentement dans cette rue des quartiers populaires.
A chaque pas, le tissus froid mouillé lui irrite la peau et elle traîne ses chaussures comme si elle devait tirer un boulet à chaque pied. Le dos voûté, ventre plié sur lui-même pour garder le peu de chaleur qui lui reste dans les tripes. Vides, les tripes, depuis plusieurs jours. Elles se tordent et semblent se dévorer entre elles. On pourrait peut-être les entendre grogner et couiner si le son de la tempête ne couvrait pas tout.

Des gens s'en vont se mettre à l'abri en courant. La rue se vide, les portes se ferment et Liza se traîne, transie de froid et incapable de lever les pieds.

Une bourrasque un peu plus violente que les autres la pousse dans le dos. Elle ne se retient plus et tombe à quatre patte, les genoux dans une flaque, les écailles des mains râpant sur les pavés.

Un moment elle se voit foutue. Personne ne viendra l'aider. Personne ne l'emmènera au sec. Elle ne devrait même pas être là et on aurait sans doute tort de lui tendre la main.
Elle ne le mérite peut-être pas, mais elle veut vivre.
Pourvue qu’elle arrive à se relever. Pourvue qu’elle avance.
Mais où va-t-elle aller ?
La pluie lui brouille la vue. Elle ne reconnaît même pas la rue. Est-ce que son esprit aussi prend l’eau ?
Doit-elle ramper comme un serpent ou est-ce que c’est vain ?

Et si elle reste là, qui la relèvera ? Personne… il n’y a plus personne et peut-être bientôt plus rien.
Si seulement Léo était là…

Elle ne sent plus ses doigts, mais ça ne l'empêche pas d'agripper cette main venue attraper son poignet.
Liza lève ses yeux verts vers son sauveur et ne semble pas en revenir.

Un miracle...
Surtout ne me lâche pas.

Elle se cramponne des deux mains s'aide du bras de cet inconnu pour se relever. Accrochée, les griffes serrées sur sa manche comme un chat qui aurait peur de la noyade, si elle pouvait elle irait se cacher sous sa veste, mais elle a trop froid pour bouger et lâcher prise.
Trop froid aussi pour bouger les lèvres et lui dire de l'emmener à l'abri au plus vite. Sa poigne et son regard suppliant le disent à sa place.

Ne me lâche pas. Je veux survivre.

Liza est très pâle même des écailles, comme si elle avait été délavée par la pluie. Ses forces aussi se sont diluées.
Ses genoux tremblent, mais elle peut encore marcher. L'instinct de survie, sans doute, lui donne la force de tenir debout malgré ses pieds engourdis.

(hrp : Je squatte, râlez si ça gène)

Il pleut, et pour pleuvoir il pleut, elle fait pas semblant Dame Nature sur ce coup la.
Du coup Mélu elle est venue juste pour ça, pour voir la ville sous la pluie, le vent, la tempête. La ville qui prend le courroux de Dame Nature en pleine gueule, bien fait la ville! Ça t'apprendra a nous polluer l'atmosphère avec tes usines et tes sales gaz.
Mélusine danse sous la pluie, chante, crie, saute dans tout les sens en éclaboussant le plus possible, elle est dans l'eau crade et boueuse jusqu'aux chevilles et ça monte encore. Elle est pas bien couverte, mais ça a pas l'air de la déranger plus que ça.
-Hahaha! C'est ça, planquez-vous bande de lâches! Ha! Vous rigolez moins maintenant hein? Vous faites moins les fiers!
Elle hurle devant les façades d'immeuble, le visage levé vers le ciel, les bras grands ouverts sous la pluie, le vent n'a pas l'air de la gêner non plus, elle ne résiste pas, se laisse entrainer par les bourrasques, cours même pour les accompagner, et elle rit, a gorge déployée.
-Prend ça la ville, prend ça dans la gueule!
Mélusine n'aime pas la ville, vous l'auriez deviné pas vrai?
Et il n'y a rien de plus jouissif pour elle que de sentir l'eau qui s'infiltre de partout dans les entrailles de la ville. Qui nettoie les bas fonds, les rues, tout. C'est l'eau qui va purifier la ville, et elle ne veut pas rater ça. Alors elle tourne dans le quartier au bord du fleuve, elle veut le voir se déchainer, sortir de son lit et envahir la ville, ça va arriver elle le sait, elle le sens.
Il le faut.
Elle cours dans les rues, cours en riant comme une damnée, en insultant la ville qui va plier devant la puissance de Dame Nature.

Ah Il y a des silhouettes la bas, plus loin dans la rue, alors elle s'approche, ça fait longtemps qu'elle n'a plus vu des hommes de la ville, elle s'approche en sautillant, en dansant, même pas froid.

-Bonjour! Elle dit, ben oui, c'est pas parce qu'elle est un peu sauvage qu'elle est pas polie hein.

Hou visiblement y en a un des deux qu'est pas trop en forme. Sauf que celui qu'est pas en forme déja c'est une "celle" et qu'en plus les écailles qu'elle a sur la figure ça lui donne pas grand chose d'humain. Mélu elle aime bien ça.

-Ça va pas? Elle demande a la fille lézard. Bha alors, reste pas planté la, t'vois bien qu'elle gèle! Elle rajoute en regardant l'homme qui la tient par la main.

Et puis elle tourne la tête vers le fleuve, il est juste la, pas loin, a une rue ou deux, caché par une barre d'immeubles.

-Haha!! Vous sentez ça? Vous sentez? La ville va en prendre plein la gueule et ça sera bien fait! Bien fait!

Elle crie ça a l'immeuble juste a coté avant d'éclater de rire et de prendre l'autre main de la fille lezard pour l'aider a se lever. Faudrait pas qu'un être comme elle finisse noyé, non non, Dame Nature aimerait surement pas qu'une fille lezard se noie.

-Aller viens, on va te trouver un coin au chaud, tu connais un coin au chaud toi pas vrai? Elle demande a l'homme.