partie de pêche

Jusque là Freyja s'était montrée froide pour masquer son exaspération, voir son énervement. Mais grâce à ses efforts de concentration afin d’accroître sa perception, elle en était venu à tout simplement ignorer les personnages qui l'entouraient. C'est ainsi qu'elle parcouru la pièce sans vraiment voir les détails, en restant sur l'essentiel. Jusqu'à ce qu'elle découvre une plaque de métal sertie d'une poignée de la même matière fichée dans le mur. Elle s’avança avec hâte vers ce nouvel élément, mais dans sa précipitation, elle ne pu éviter le gros cadavre sur lequel elle trébucha. Elle s’étala de tout son long sur le cuisinier obèse et pesta bruyamment en des termes qui auraient fait pâlir un guerrier Goths. Puis elle sentit autour de la taille du bonhomme boursouflé une ceinture avec un fourreau dans lequel se trouvait un couteau de cuisine acéré; elle n'hésita pas longtemps et le pris avant de le cacher dans ses vêtements. Freyja espérait ne pas avoir à s'en servir, mais ses compagnons ne lui inspirait aucune confiance, il valait mieux être prudent. Freyja se releva et terminait sa course. Devant la plaque de métal, elle pu se rendre compte qu'il s'agissait en réalité d'un vide-ordure de cuisine. Celui-ci devait sans doute servir à se débarrasser de tous les déchets organiques produits. Habituellement ces appareils fonctionnaient grâce à un système d'aspiration dans des conduits sous-terrains et menaient ensuite directement dans les gigantesques bennes à l'extérieur. Freyja souhaitait que le conduit soit encore intact.

J'ai trouver une sortie, s'écria-t-elle ! Malheureusement, c'est très étroit, je pense pouvoir passer, mais je ne tablerais pas sur les plus volumineux d'entre vous. C'est un vide-ordure qui mène directement à l’extérieur.

Freyja s'assit, en faisant un maximum de bruit pour attirer ses compères, sur une cuisinière d'où émanait déjà une odeur noséabonde de gaz à combustion, mais Freyja ne comptait pas rester bien longtemps. Cette endroit, et surtout les personnes qui l’entouraient suintaient la malhonnêteté et le mauvais présentiment ambiant était exponentiel.

Les deux camions commandités par Phil venaient enfin d'apparaitre dans la nasse de la circulation aérienne de Novlangue, tractant chacun sur une plateforme un engin qui s'apparentait pour Phil aux bulldozers de son époque.

Arrivés à leur hauteur, les deux camions se figèrent avant de tourner sur eux-même et posèrent les plateformes sur le bord de la chaussée.

Mason sauta de joie et agrippa son conseiller :

- Ha ! Ils sont enfin arrivés ! cria-t-il.

Il trottina à vive allure dans leur direction en se frottant les mains et attrapa le maitre d'oeuvre par l'épaule avant de l'emmener à l'écart.
Les consignes étaient claires : dégager la voie, trouver les rescaspés et identifier en plus vite un dénommé Lester, grand, brun, plutôt maigre et l'air maussade. Une fois ce dernier trouvé, le ramener en priorité et l'escorter dans la plus grande discrétion possible jusqu'au véhicule de Mason.

- Et restez en contact radio ! ordonna Phil en rejoignant Henry.

Lester n'était plus loin, une question de minute seulement et Phil avait une foi aveugle envers les moyens technologies de cette époque, des moyens qui, combinés avec son cerveau, allait faire de lui le maitre inconsteté de Novlangue.

Mais chaque chose en son temps.

Drew fut un peu agacée de voir que ce type ne l’écoutait pas une seconde et agissait rapidement pour montrer qu’il savait se débrouiller seul, et ce avec un petit air supérieur sur le visage. Elle le regarda, arcade sourcilières froncés. Elle aurait bien voulu lui faire un croche-pied pour qu’il fasse moins le fière, mais par respect elle préféra s’abstenir.

Elle le suivit des yeux et l’entendit faire un commentaire plutôt insultant envers Lester. Ce dernier réplica rapidement, et Drew sentait la tension monter dans la pièce. Elle hésita à intervenir, mais finalement, elle se dirigea vers les deux hommes.

- Messieurs ! Vous n’allez tout de même pas commencer de vous disputer ! Nous sommes dans une situation critique et vous ne pensez qu’à vous lancer des piques comme deux gamins ! Cet endroit est bancal et tout menace de s’effondrer. Alors maintenant, avancez avant de finir en dessous de plat !

Cette dernière phrase s’dressa à Yuann. Elle le fusilla du regard, bien qu’il ne pouvait la voir. Elle n’avait pas supporté qu’il se soit adressé à Lester comme il l’avait fait. Selon elle s’était simplement de la méchanceté gratuite et utile qu’à enrager les gens.

La jeune femme se tourna vers son ami et lui arracha la seringue.

- Tu peux m’expliquer ça ? fit-elle, furieuse.

Elle regarda son bras. Ses yeux s’était complètement habitué à l’obscurité et elle y voyait quasiment comme en plein jour. Elle put alors percevoir un mince filet de sang couler le long du bras de Lester. Ce type ne savait même plus s’y prendre avec une seringue…

- Tu m’avais dit que tu avais arrêté… Tu me mens maintenant ? Puis, regarde moi ça, t’es même plus foutu de trouver une veine !

Elle le regarda droit dans les yeux. Ce comportement la décevait tellement. Elle-même avait arrêté de fonctionner aux antidépresseurs. Pourquoi lui ne pouvait-il pas se passer de drogue ?

Lorsque l’autre femme annonça qu’elle avait trouvé une sortie, Drew choisit de ne pas rester là plus longtemps et alla la rejoindre. Ce qu’elle appelait une issue était un vide ordure comme on en trouve dans n’importe qu’elle cuisine. Mais quelque chose la dérangeait.

- Ces vide-ordures ne sont-ils pas munis habituellement de broyeurs ?

Il est vrai que cela aurait été une bonne sortie mais cette éventualité l’inquiétait. Elle ne voulait pas finir en pâté alors que les secours pouvaient arriver d’une minute à l’autre. D’ailleurs, elle pouvait entendre de très faible bruit venant de l’extérieur. Sans doute étaient-ils déjà là.

Le problème était que cet endroit était très instable et s’ils commençaient le déblaiement, ils risqueraient se toucher un point sensible et d’aggraver l’éboulement. Ils risquaient donc tous leur peau en restant là.

- Et puis merde, allons-y !

La jeune femme qui l'avait accompagné changea radicalement de comportement lorsqu'il titilla l'homme dérangé. Un point faible interessant...
Sa volonté d'avancer et d'asagir était remarquable mais les choses se précipitaient au dessus d'eux. Yuann entendit clairement un esprit malin parler d'Esther. Au moment ou la jeune femme voulu partir dans le conduit, il la retint en posant une main sur son épaule.

Attends...! Hum... Comment expliquer-ça... Des gens sont arrivés pour déblayer le bar mais... l'un d'entre eux mènent des opérations pour ramener ton ami au plus vite, et il semble très loin d'être bienveillant.
Alors cours dans leur bras si tu le désires, ou prépare quelque chose pour ton ami qui va finir facilement entre leurs griffes.

Un changement soudain de comportement, car il avait lui-même peur d'être recherché et même s'il pouvait anticiper et trouver facilement les ouvertures, prudence est mère de sureté.
Le mentaliste s'assit en tailleur, le dos bien droit et ne dit plus mot, explorant l'extérieur tout en guettant la réaction de ses compagnons de galère.

La voix de Lester s'était teintée d'amertume. Fermement, il avait posé une de ses mains sur celle de Drew, celle qui enserrait son poignet.
- Je ne t'ai jamais dit que j'avais arrêté. Toute ma vie, depuis mon premier souffle, les mentalistes du Temple m'ont drogué. J'en avais besoin pour survivre, pour supporter mon corps. Il n'y a que dans les films de propagande où la volonté triomphe sur la fatalité.
Mais elle était déjà partie. En coup de vent, féline, insaisissable, Drew s'était échappée. Il semblerait qu'elle était courtisée par un autre homme, par lui, qui plus est. Drew était une chic fille. Elle méritait mieux.

Mieux, cela voulait dire mieux que lui, et mieux que Lester lui-même, car Lester était conscient de sa médiocrité, cela faisait longtemps qu'il ne se berçait plus d'illusions. Il assumait totalement son état du pire mentaliste de l'état.

Mais mentaliste l'était-il encore réellement ? Il avait semé le trouble lors du carnival puis faussé compagnie à la mentaliste chargée de le chercher. Il avait suffit, avec la complicité de Phil, de se séparer de ses menottes grâce à du lubrifiant. Ce qu'ils avaient ri. Jamais de sa vie il n'avait ri de la sorte. Insouciance, excentricité. Il s'était vautré dans le pathétique comme le cochon dans la boue. Et il en redemanderait bien, si cela lui était possible.

En l'instant, il se rappela qu'il était en cavale. Et le temple, qu'en pensait-il ? Il était persuadé que le Temple l'avait déjà oublié, rien de plus. Ils étaient débarrassés d'un fardeau. Qu'il crève derrière une poubelle, qu'il croupisse dans les égouts. Qu'il meurt, qu'on ne l'entende plus, et s'il daignait revenir, qu'il le fasse le froc baissé et les genoux qui raclent le sol en signe de soumission. Chien, mauvais chien. Cabot des rues, clébard de pisseux !

- S'ils me cherchent, ils me trouveront. Je propose d'y aller le premier. S'ils me tombent dessus, ils ne feront plus attention à vous. Après tout, c'est moi qui les intéresse non ? Je suis grand, mais maigre. Niveau largeur, je fais en moyenne deux fois moins que vous. La drogue décontracte mes muscles, m'assurant ainsi une plus grande souplesse. Si je ne passe pas, personne ici ne passera.
D'un côté, il avait sans doute raison. Officiellement, il devait aussi être l'un des plus vieux homme au milieu de cette cohue. 127 ans au compteur, et un corps de 23. Par contre, il n'était pas encore persuadé d'avoir atteint la sagesse.

Lorsque l’insurger posa une main sur son épaule, le premier reflexe de Drew fut l’enlever avec un à-coup sec. Cet homme n’avait pas à la toucher, surtout après s’être montré aussi désagréable avec tout le monde.

Elle se tourna vers lui et leva ce qui fut un sourcil. Ce qu’il disait lui semblait stupide et infondé. Il avait beau pouvoir percevoir des choses que les autres n’arrivaient pas à ressentir, il pouvait bien se tromper. Qui en voudrait à Lester ? Drew se souvenait de cette femme qui voulait le ramener au temple au carnival, mais d’après Yuann, le directeur des opérations extérieures était un homme.

- Ce n’est pas à vous de dicter mes lois, ce serait même le contraire. Je fais ce que je veux quand cela me chante. Alors si je décide de passer dans ce conduit maintenant, je passe dans ce conduit maintenant. Compris ?

Lorsqu’elle se tue, ce fut Lester qui prit la parole pour proposer de passer en premier afin de faire diversion et de permettre aux autres de sortir en toute sécurité. Une autre idée stupide selon l’avis de Drew. En quoi un mentaliste pouvait-il faire diversion en se faisant capturer ? Un mentaliste n’était-il pas un allié du gouvernement ? De plus, s’il sortait, les autorités n’allaient pas directement abandonner tout espoir de voir quelqu’un d’autre sortir.

La jeune femme regarda Lester, perplexe. Elle se surprit même à penser que la drogue avait déjà fait son effet afin qu’il ne pense plus clair.

- Tu as conscience de ce que tu dis, Lester ? C’est complètement idiot. Je ne vois pas qui te voudrait du mal et pourquoi. De plus, s’il te choppe, ils ne vont pas tout lâcher comme ça. Tu n’es pas le centre de leurs intérêts. Je propose donc que l’honneur de sortir en premier revienne à la jeune femme qui a trouvé le passage. Je ne pense pas que quiconque veuille la capturer. Sans oublier qu’il ne sont sans doute pas en train de surveiller le vide ordure car c’est une idée folle de sortir par ici, et les déblayeurs ne vont pas forcément penser au-delà de leur but premier.

Drew s’écarta donc du passage pour laisser la place à l’autre femme de passer. Elle en avait marre d’attendre ici avec tous ces gens. Elle avait hâte de retrouver son chez-soi détruit et son inconfort perpétuel.

Certes, le débat avait été court pour savoir qui allait emprunter le conduit en premier, mais il était avant tout inutile, car Freyja n'avait attendu l'aval de personne pour s’engouffrer dans l'étroite embouchure.

Ce type de conduit sont habituellement relié à un four pour incinérer les déchets et non à un broyeur, déclara-t-elle, c'est encore plus efficace et les détritus n'ont pas le temps de pourrir et de dégager d'odeur. Mais il n'y a normalement pas de danger, si le four était allumer, avec tout le gaz rependu dans la cuisine et que je peux sentir jusqu'ici, nous ne nous poserions même pas la question, tout aurait explosé !

Mais comment une Valkyrie pouvait-elle savoir ça ? En réalité, Freyja savait beaucoup de chose, c'est sa nature curieuse qui l'avait mené à se renseigner sur ses détails qu'elle apercevait de temps à autres, savoir comment fonctionnait les choses la rassurait. C'est ainsi qu'elle en était venu à savoir beaucoup. Parfois même tombait-elle sur des informations qu'elle n'aurait pas du connaitre, sans même avoir à trop fouiner, des parties de l'histoire qui ne concordaient pas à la vérité de l'état, mais que celui-ci n'avait pas pris la pêne de cacher, trop confiant du manque de libre arbitre de son peuple. Freyja était devenu avec le temps une mine d'or d'information et l'association entre les secrets de ses clients et ses recherches pouvait en faire une personne potentiellement dangereuse pour ceux qui ne s'entendent pas avec la vérité; mais cela personne ne le savait, c'était une passion personnelle que Freyja n'avait jamais pensée monnayé out trafiquer.

Freyja continua son épreuve de souplesse et de patience dans l'étroit passage, elle ne savait pas si on la suivait où pas, mais à sa sortie, une nouvelle quête attendrais Freyja : celle d'en apprendre plus sur ses compères. Elle arriva à un delta ou plusieurs autres vide ordures débouchait et le passage s'élargit, elle pouvait maintenant y circuler à quatre patte au lieu de ramper, le bout de chemin était proche.
Après quelque minutes encore le four fit son apparition, c'était un grand caisson en métal et en verre joncher de cendre et de morceaux calcinés, mais heureusement aucune flemme ni même mauvaise odeur. Sans se retourner pour attendre les autres, elle donna de grand coups de pied contre la porte qui donnait sur une autre pièce elle aussi très sombre, mais aussi très sale et vide. La porte ne s'ouvrit jamais, cependant la vitre qui la composait fini par céder sous l'action des talons de Freyja. Le verre vola en éclat et Freyja fut partiellement blesser aux chevilles et aux mains qui avaient couvert son visage. Freyja recula, un peu surprise puis repris ses esprit et exécuta une acrobatie maladroitement pour sortir sans avoir à toucher les débris tranchant encore fixés à la porte. Elle atterit accroupie dans un chariot à roulette disposé juste en dessous et destiné à recueillir les cendre pour les mener aux usines de saponification. Elle se releva vit et enjamba le chariot pour retrouver la terre ferme. Elle s’apprêta à courir vers la dernière porte qui devait la conduire à l’extérieur, mais fut foudroyer par une douleur irradiant le long de son dos et tomba à la renverse. Apparemment, son saut n'avait pas eu l'effet escompté et elle écopait d'une profonde entaille à quelque millimètre de la colonne vertébrale. L'intense souffrance que Freyja ressentait lui interdisait tout nouveau déplacement, la Valkyrie commença à se sentir mal, elle semblait si mal que même le drogué serait passer pour un monstre de lucidité à ses côtés. Freyja était sacrément sonnée !

Soupir
puis j'inspire, gonfle mes joues et souffle d'ennui un peu moins discrètement.
Ils sont chiants !

-Ben moi je retourne dans la cave !

Na !
C'est vrai quoi, ils font rien qu'à se disputer et on avance pas.
J'en ai marre de cette partie de crapahutage dans les décombres.
Et puis j'ai mal aux pieds !
C'était marrant un moment, mais ça suffit maintnant ! Surtout avec une équipe comme celle-là. Ya le malade qui se drogue, l'aveugle saoul qui lui cherche tout le temps des poux dans la tête, la chauve qui fait des remontrances et la collègue qui nous attend même pas... c'est nul !
On essaie de calmer le jeu, de passer un bon moment tous ensembles, mais ils font aucun effort. Alors j'm'en vais ! Ouais, parfaitement ! Si je leur manque, ils n'ont qu'à me suivre, sinon, je boude ! Et puis s'ils me suivent pour venir continuer à se bouffer le nez dans la cave, je préfère autant qu'ils ne viennent pas.

Qu'ils aillent se promener dans le vide ordures si ça leur chante. Moi je vais attendre les secours.
Ça doit puer, le vide ordure, même si au bout les déchets sont cramés. En plus la chauve a parlé de broyeur. J'ai pas envie de me faire broyer ou incinérée, moi.

Donc, je rallume l'écran de mon portable pour voir un peu où je vais, je lance mes chaussures dans l'escalier de la cave et j'escalade pour y retourner.

Lester regarda la Valkyrie, adroitement, se faufiler dans le conduit. Durant un instant, il eut, exposé à ses yeux aux pupilles dilatées, un magnifique fessier moulé dans son étui de plastique blanc. Évidemment, il n’en perdit pas une miette, savourant ce spectacle d’une grande rareté. Dans le vide ordure, qui plus est, voilà une mise en scène qui laissait une agréable part à son imagination. L’homme n’en demandait pas tant, pourtant.

Lorsqu’il fut sûr que la femme soit assez loin pour ne pas pouvoir le blesser à coups de talons, et qu’elle ait assez d’espace pour essayer de faire demi-tour ou une manœuvre si elle en ressentait le besoin, il releva ses manches, plus tout à fait immaculées, bomba le torse en respirant une grosse goulée d’air saturé en gaz, et se pencha en avant, bien bas, le bout des doigts frôlant le béton émietté. On ne lui avait jamais appris à faire la révérence ; il avait improvisé selon ce qu’il avait lu ou écrit.

- Je vous salue (Marie, mère de Dieu). C’était un non-plaisir partagé que de vous côtoyer. A tout de suite, ou à jamais. Quelle différence ?
Disant cela, il s'approcha tout particulièrement de l'aveugle à qui il enserra amicalement les épaules. Ses mains se firent même plus aventureuses puisqu'en se retirant, il effleura nonchalamment son dos, comme une caresse.

Finalement, il était pas si mal foutu que ça... Dommage qu'il ait été si con.

Puis Lester leur sourit aimablement, même si ce sourire, couplé à ses pupilles hallucinés, s’interprétait plus comme un rictus de dément. Il venait d’effleurer des lèvres la peau parcheminée de Drew, caressant son fin duvet de la pulpe de sa lèvre inférieur. La senteur épicée et musquée qui s’échappait de pareil animal le submergea, presque plus que le fessier de la walkyrie.

Que le monde était aimable, aujourd’hui. A croire qu’il allait réellement mourir. Il espérait juste avoir comme dernière vision les mollets galbés de la charmante créature qui ouvrait la voie et le conduirait peut-être à une mort certaine. Mais au moins n’y allait-il pas seul !

- Bon, trêve de bavardages… J'espère qu'on se reverra Drew...
Eh bien oui, du coup, il n’était toujours pas parti…

Alors il se coucha dans le vide-ordure et se mit à ramper, sans grâce aucune. Difficile d’être glamour dans pareil moment. Il tenta de rattraper la femme. Quand enfin elle fut à sa vue, elle venait de faire éclater une paroi en verre et s’était blessée. Lester se rapprocha, haletant :

- Vous allez bien ? Ne vous inquiétez pas, je vous suis !

Vu le peu d’espace, elle ne pourrait pas se retourner, mais au moins saurait-elle qu’elle n’était plus seule !

Une séparation? quel dommage... Il aurait bien souhaité suivre la jeune femme rosée mais il avait davantage le desir d'avancer, de faire face à un destin incertain. Surprenant personnage, le drogué l'effleura et se montra très amical... trop peut etre... Ils s'engoufrèrent dans le conduit les uns après les autres et déjà il senti que celle qui menait le petit cortège s'etait bléssé superficiellement.

Hum...

Il tourna une derniere fois la tête en arrière juste avant que la jeune femme n'entreprit sa petite escalade.

N'hesitez pas à nous rejoindre, et si vous avez besoin appelez-moi.

Sans plus attendre, il prit la suite dans le vide ordure, se faufillant difficilement. Il n'était pas de la même carrure que Lester, mais très vite il les rattrapa... des bouchons dans un vide ordures, ça sent pas bon.

He bien... ça bouchonne ici!!!!

Drew regarda la valkyrie entrer dans le conduit. Elle se mit à penser que ce n’était pas vraiment la meilleure solution. Cela ne lui plaisait pas d’entrer dans un vide-ordure, non pas à cause des saletés qu’on pourrait y rencontrer, mais parce qu’elle n’était pas sûre de ce qui pouvait bien se trouver au bout. Freyja avait pourtant dit qu’il y avait de fortes qu’il s’agisse de fours et qu’ils devaient être éteints, mais cela n’avait pas convaincu la jeune NOD.

Alors qu’elle prit une grande inspiration pour s’y engager à son tour, elle entendit une voix derrière. C’était la serveuse qui disait vouloir retourner à la cave pour y attendre les secours. Ce n’était pas une si mauvaise idée. Après tout, on y était plus en sécurité que dans la cuisine où le plafond menaçait de s’effondrer. Elle hésita à la rejoindre mais Lester, lui, venait de s’avancer pour entrer dans le conduit.

En passant à côté de l’aveugle, il fit un geste que Drew jugea totalement puéril. Comment pouvait-il encore faire le titre dans une telle situation ? Ils étaient à deux doigts de la mort, et si l’aveugle disait vrai, quelqu’un à l’extérieur en avait après Lester. En gros, les risques pour le mentaliste étaient encore plus élevés que pour les autres, et il trouvait encore le moyen de faire l’enfant.

Lester s’arrêta devant elle avant de rentrer dans le vide-ordures et lui dit :

- Bon, trêve de bavardages… J'espère qu'on se reverra Drew...

- Je l’espère aussi… lui répondit-elle avec un demi-sourire et à demi-convaincu.

Elle le laissa partir sans savoir encore si elle comptait le suivre. Après un bref instant, la voix de Lester remonta jusqu’à elle. Ce qu’il disait acheva de démotiver Drew à entrer dans le conduit. Il semblait que Freyja était blessée, et cela ne plaisait pas à Connor. Et elle fut bien contente de voir que l’aveugle la doubler pour entrer dans le vide-ordures. En temps normal, elle aurait trouvé ça non galant et égoïste de se faire dépasser par deux hommes sans que l’un d’eux ait l’idée de la laisser passer en première, mais dans le cas présent, laisser les autres entrer avant elle signifiait qu’elle tarderait à venir elle aussi.

- He bien... ça bouchonne ici!!!! Cria l’aveugle de l’intérieur du vide-ordure.

Elle jeta un coup d’œil à l’intérieur et ne vit rien. Cependant elle utilisa ce fait comme excuse pour retarder encore un peu son tour. Elle s’écarta du passage et regarda rapidement autour d’elle. Tout n’était que corps et décombres. Qu’elle vision désolante… Connor fit alors ce qu’elle aurait put faire sur un champ de batail, après tirs et bombardements : elle se dirigea vers chaque cadavre accessible et lui ferma les yeux tout en lui souhaitant de partir en paix.

Elle fut bien horrifiée de tomber sur un survivant. Il s’agissait d’un jeune homme coincé sous une grosse poutre dans un coin de la pièce. Personne ne l’avait entendu, sans doute parce que lui ne disait rien. Il était là, agonisant. Du sang giclait de sa bouche et l’empêchait de respirer convenablement. De plus, la poutre lui compressait la cage thoracique. Drew comprit tout de suite que cet homme était condamné car ses blessures étaient considérables et les secours tardaient à venir. Alors au lieu de le laisser souffrir dans son coin, ou bien d’appeler à l’aide dans le vide-ordure, elle fit quelque chose qu’elle regretta tout de suite après. Elle s’empara de la première barre en ferraille qui lui tomba sous la main et l’enfonça en plein dans le cœur de la victime. Elle regarda la vie quitter son corps et se retira dans un coin opposé de la pièce pour se repentir.

(vous m'excuserez, mais j'ai un rp qui m'attend)
Lester continua de ramper, jusqu'à atteindre la petite salle dans laquelle Freyja s'était coupée. La femme se reposait un peu de côté. Elle avait libéré juste assez de place pour qu'il puisse passer et continuer le périple. Il était vrai que l'homme était tout sauf très heureux à l'idée de prendre la tête de file, mais il avait surtout envie de quitter ce lieux puant et ces gens. De toute manière, s'il y avait un danger, ce qui n'était pas le cas, autant se rassurer tout de suite, il doutait que les gens à ses arrières n'en réchappe.

Aussi lança-t-il un grand sourire niais à la Valkyrie tout de moulant vêtue, et il s'engagea dans le conduit qui avait la fâcheuse manie de glisser sous ses paumes déjà recouverte de graisse et d'autres choses plus ou moins identifiables. Mais il en fallait bien plus à Lester pour se décourager, d'autant que du sang des fjords coulait dans son sang. Autant qu'il honore les ancêtres qu'il n'avait jamais connu !
- Putain !
Et voilà qu'il était coincé dans le tube, gigotant et grognant comme une bête. Non, coincé, impossible ! Il devait y arriver. De plus, un mince courant d'air frais passait sur son visage et s'engouffrait dans ses cheveux. La sortie était toute proche ! Déjà, l'obscurité semblait moins profonde.
- Je vois la sortie !
Sauf qu'il était coincé en plein devant.

Au pire, il n'avait qu'à attendre quinze jours, le temps de maigrir et de passer, mais curieusement, cette possibilité ne lui donnait pas très envie. Ainsi, il préféra se contorsionner et jouer de son corps luisant de gras et de saleté, tel la peau d'une anguille. Il réussit à se faire glisser contre les parois de métal, et se décoinça, lorsque la largeur du tuyau augmenta.

L'air filtra à nouveau la mince barrière de ses lèvres. Lester se sentit revivre.
- Faites attention, il y a un passage particulièrement étroit, mais assez court !
Lester gagna la sortie et se laissa choir dans la boue humide du sol. Il embrassa du regard les quelques brins d'herbes qui poussaient encore, et rampa jusque sur l'asphalte comme un maudit microbe, encore puant et affaibli.
Il mit un certain temps à se relever avant de chercher du regard quelque chose, quelqu'un. Il devait forcément en avoir !
- Hé ! Le voilà qui hurlait tout en s'accrochant désespérément au mur qu'il longeait. Il espérait ainsi tomber sur une source humaine, car il doutait que les secours ait quitté si vite le Bagdad, à moins que leur périple n'ait déjà duré des jours entiers. Comment le savoir, six pieds sous terre ?

Une petite veine commençait à pointer le bout de son nez sur la tempe de Phil, battant la mesure des secondes interminables. Adossé à sa voiture, un cimetière de mégot à ses pieds, il regardait son équipe chargée de déblayer le Bagdad Café, incapable de pouvoir aller plus vite que la musique.
Étrange sentiment que celui de l'impuissance, qui pour le coup, l'assaillait de toute part. Lui qui avait l'habitude de tout régler en quelques heures lorsqu'il s'agissait de ses problèmes. Mais dégager un passage dans un immeuble effondré, voila qui dépassait de loin ses compétences.

Il décolla son dos du véhicule, fit quelques pas vers le capot et asséna un énorme coup de poing sur la carrosserie, les dents serrées.

- Hoy ! Don't bugger it ! intervint Henry. J'ai eu assez de mal à la trouver celle-là !

Son conseiller et meilleur ami avait passé un nombre indécent d'heures en recherches et appels pour trouver le joyau que son patron désirait : une Bentley State Limousine. Depuis que Phil l'avait vue dans une vidéo d'archive, il ne jurait plus que par elle. Un soir d'apéritif trainant, il avait demandé à Henry de lui en trouver une, sur le ton de la plaisanterie. Il fallait croire que son acolyte de toujours avait bonne mémoire ; une centaine d'années plus tard, monsieur Mason en avait une. Révisée afin qu'elle vole et assemblée à partir d'une multitude de pièce achetées aux quatre coins de la Nouvelle Europe.

- Écoutes, continua Henry. Je sais qu'il est très important que Lester soit retrouvé, même si je ne comprend toujours pas pourquoi. Et on va le trouver. Ces gars sont TES hommes, et ils feront tout pour le trouver, ces rats d'orthodoxes ont bien trop peur de nos représailles.
- Je ne le sais même pas moi même, répondit Phil. Pourquoi ?

Il se tourna vers Henry, l'air momentanément désorienté, le regard loin.

- Pourquoi lui ? continua Mason. Qu'a-t-il ? Lui, le petit mentaliste minable, incapable d'exécuter correctement sa tâche et drogué jusqu'à la moelle. Nous sommes tellement au dessus.

Il regarda fixement Henry, colère et crainte mélangées dans ses yeux.

- Monsieur ! cria le chef des travaux qui venait d'arriver. Nous commençons à dégager le passage. On va pouvoir descendre. Par contre nos capteurs nous ont indiqué des mouvements prolongés, il se peut qu'ils aient trouvé un moyen de sortir.

Phil sentit une vague de soulagement le gagner. Un sourire lui monta jusqu'aux oreilles et il frappa dans ses mains.

- Parfait ! répondit-il. Continuez votre travail, au cas où ils aient bougé sans pour autant trouver le moyen de sortir. Mais guettez tout de même les alentours. Une fois tout le monde dehors, entamez directement les travaux. Je veux cet endroit neuf dans une semaine !

Mason ne laissa même pas le temps à son interlocuteur de répondre qu'il remontait déjà dans sa voiture en faisant signe à Henry de le suivre. Il ordonna au chauffeur de tourner lentement autour des lieux et sortit une bouteille de gin du mini bar.

- Tu es de retour ? demanda Henry. C'est fini le paumé tragique ?
- Piss off ! J'en dors pas.

Phil se rapprocha de sa vitre, scrutant le moindre mouvement suspect.

- Il est quelque part, dit il lentement. Tout près, et je ne sais toujours pas pourquoi il me le faut. Il est une pièce maîtresse de mon échiquier.
- Sérieux ? Lui ?
- Je sais, ça parait fou. Mais oui, Lui.
- Tu me les fera toutes, tu pourra le dire le jour de mes funérailles. Moi Phillip Georges Mason, je lui ai tout fait.
- On dirait que tu parles de cul.
- Je lui ai tout fait, à part au lit.
- Le seul et l'unique. Je suis assez fier de ça.
- Et inversement mon grand, à nous deux, on s'est tapé tous les mecs de cette ville.
- Femmes comprises pour toi.
- J'étends mon champ de possibilités, tu devrais faire de même. NOM DE DIEU ! STOP !

Henry s'était mis à hurler soudainement et s'était jeté au dessus de Phil pour se coller à la vitre. La voiture freina un coup sec et les envoya d'un coup vers l'avant, déversant leurs verres partout à l'arrière.

- Regardes, dit Henry. Dans la ruelle au fond. Il est dans l'ombre mais des gars dans cette tenue ça court pas les rues.
- Tu n'as jamais fait l'Underground Berlinois, répondit Phil en cherchant des yeux. Bless me ! C'est lui.

Il ordonna au chauffeur d'avancer dans la ruelle. Le véhicule s'engagea et avança lentement vers le mentaliste désorienté. Il semblait titubait, ce qui amusa Phil, fidèle à lui même, pensa-t-il.
La voiture s'arrêta à quelques mètres de Lester et Phil ouvrit sa portière. Il sortit avec toute la classe qu'il pouvait, malgré son costume imbibé de gin et s'inclina devant le mentaliste, bras derrière le dos, à la manière d'un majordome.

- Your car, my Prince, lança-t-il avec amusement.

Lester traînait lamentablement, toujours adossé au mur et le suivant péniblement, comme une limace. Sa frêle carcasse ressemblait à un édifice tremblant, sur le point de chanceler, comme si la moindre bourrasque ferait voler au loin ses composants désoudés. Mais l'homme n'était plus à ça près. Il se sentait vide de toute substance. Vidé, oui, c'était le mot.

Lester entendit le ronronnement feutré d'un aéroplaneur à quelques mètres de lui, qui se rapprochait. Il n'y fit pas attention. Habituel. Mais l'aéroplaneur ne passa pas dans son dos, comme prévu, il le doubla et s'arrêta, expédiant les feuilles mortes et le conglomérat de détritus sur la chaussé contre le bâtiment. A quelques mètres de là, un clochard sursauta pesamment.

Lester resta scotché par le spectacle d'une si belle... bagnole ! Car aucun doute n'était permis : c'était une VRAIE bagnole, pas une de ces tôles nouvelle en synthétique, une vraie de vraie remodelée à la sauce 2140 ! Et ça, c'était assurément un gage de richesse. Il fallait avoir des couilles en or pour pareil truc !

Un homme ouvrit la paupière. La coupe de son costume était élégant, bien que, de suite, une indélicate odeur d'alcool chatouille le nez du mentaliste. Aussitôt, des bribes de souvenirs, couplés à cette bouille pouponne et ces fins cheveux blonds. Cela faisait longtemps que Lester n'avait pas vu quelqu'un d'aussi beau. Il avait passé des jours dans la puanteur de Winston Smith Station, avec, comme seuls relations, des vieillards aux dents pourris et des plus jeunes sévèrement loupés. L'eugénisme de Novlangue avait au moins la particularité d'épargner les pauvres globes oculaires...

— Your car, my Prince.
Ah ouais, rien que ça.
Lester, bouche béante de stupéfaction, se prit à lui répondre naturellement en anglais, chose que jamais il n'aurait fait auparavant :
— What's this... fuck ?
Il attendit, le temps d'un battement de cœur, que l'hallucination parte, mais l'odeur d'alcool chatouillait toujours ses narines. Il n'osait imaginer celle qui devait chatouiller les sinus de Phil Mason, car c'était bien de lui qu'il s'agissait !

Lester pénétra dans l'habitacle, un peu désolé de salir pareil cuir de vachette. Sous ses fesses, la peau était douce et élastique, même chaude, un régal. Et lui, il puait. Il lança un sourire triste à Phil et son chienchien dont il avait hélas oublié le nom :
— J'étais enfermé avec une sacré bande d'enculés, alors je suis sorti. J'ai dû passer par le vide-ordure... Ceci explique en partie cela, par extension...
Il désignait ses habits, au départ impeccables, maintenant putride comme s'il était tombé dans une fosse à purin.
— Ouais, je suis remonté, et ça a pas été facile...

La situation était quand même dingue !
Mais vrai de vrai : il avait jamais eu peur de se salir les mains !

Phil s'essuyait tant bien que mal avec une serviette tandis que Lester lui faisait un rapide compte-rendu de son escapade. Le mentaliste était définitivement plus encrassé que les deux automates mais Phil ne se souciait guère. Quelques paiements et les banquettes seraient comme neuves.

- Ne t'en fais pas, dit-il. On est bien couverts de gin. Je ferai nettoyer.

Il ressortit la bouteille et servit trois verres. Il leva le sien et trinqua.

- À ta liberté mon cher Lester !

Les verres s'entrechoquèrent et Phil ordonna au chauffeur de se rendre immédiatement au Finchley Road Building. La voiture changea de cap et se dirigea vers le quartier des Automates.

Hrp : mon appart se trouve au dessus de mon bureau, prends une douche, espèce de pouilleux Smile

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